Des milliards de dollars vont être consacrés à la modernisation des infrastructures américaines dans le cadre de la loi sur la réduction de l'inflation (IRA), un coup de pouce tardif mais néanmoins bienvenu pour lutter contre le changement climatique et l'inflation galopante. Ou comment faire d'une pierre deux coups ! Récit d’Edward Lees, du pôle Stratégies environnementales de BNP Paribas Asset Management et cogérant du fonds BNP Paribas Energy Transition, acteur à part entière de la transformation énergétique.
Comment ce projet de plusieurs centaines de milliards de dollars va-t-il contribuer à la baisse progressive de l'inflation ?
Outre la baisse des prix des médicaments et des primes d'assurance-maladie, cette somme a vocation à créer des infrastructures qui, à terme, devraient avoir un effet déflationniste sur les « coûts énergétiques quotidiens » et les dépenses des ménages.
La Maison Blanche a vanté les mérites de ce projet de loi de 430 milliards de dollars pour lutter contre une inflation inédite depuis une décennie, même si l'on ne sait pas (encore) dans quelle mesure il pourrait se substituer à l’action nécessaire de la Réserve fédérale pour lutter contre l'inflation, en plein cycle de hausse des taux.
Commençons par faire remarquer l’état désastreux de la majorité des infrastructures américaines. Le recours accru aux énergies propres pourrait être compromis sans une refonte des infrastructures électriques, une tâche qui nécessiterait plus de 2 000 milliards de dollars d’investissements selon certains experts. Le réseau se dégrade en raison du sous-investissement et de son âge et les pannes observées lors d'événements météorologiques de plus en plus fréquents et violents témoignent de son état lamentable.
Vers une baisse des factures des foyers
Quels sont les avantages en termes de coûts ? Pensez simplement aux coûts actuels d'utilisation d'un véhicule électrique par rapport à une voiture à essence (le carburant coûte un peu plus de 4 dollars le gallon, soit 27 % de plus que l'année dernière). Pensez également aux aides publiques pour l'achat d'un véhicule électrique neuf ou d'occasion, qui vous permettent de faire des achats sur d’autres postes de dépense.
Les panneaux solaires installés sur les toits permettent de réaliser d'importantes économies sur les factures d'électricité par rapport aux tarifs pratiqués par les entreprises de services aux collectivités (qui ont augmenté d'un peu plus de 10 % par rapport à 2021[1]).
Nous pensons que l'électrification et le déploiement des énergies renouvelables, comme le solaire et l'éolien, entraîneront une baisse des coûts. Un redimensionnement des infrastructures réduira progressivement les coûts, ce qui n'est pas le cas avec les combustibles fossiles.
Ni avec l'énergie nucléaire d'ailleurs. Si l'énergie nucléaire est souvent considérée comme une énergie « bas-carbone », - elle émet quatre fois moins de CO2 que l'énergie solaire, deux fois moins que l'hydroélectricité et autant que l'énergie éolienne - elle n'est pas renouvelable (même si l'uranium peut être recyclé).
Les coûts indirects du changement climatique
En outre, les coûts indirects ne peuvent pas être ignorés. S'il existe effectivement un coût marginal d'exploitation pour chaque centrale nucléaire (sans parler de la mise de fonds initiale), il est impossible de ne pas tenir compte des coûts de mise hors service et liés aux catastrophes. Le nettoyage de la centrale de Fukushima au Japon a été estimé à plus de 180 milliards de dollars.
Parmi les coûts évitables, on peut également citer les fonds nécessaires aujourd'hui pour lutter demain contre les effets du changement climatique, comme les inondations, les sécheresses, les feux de forêt et les ouragans. Les catastrophes naturelles ont coûté aux États-Unis plus de 300 milliards de dollars en 2021. La Maison Blanche estime que ce montant pourrait atteindre 2 000 milliards de dollars par an d'ici 2100.
Le réchauffement de la planète risque de nous coûter très cher si aucune mesure concrète n'est prise. Dans la mesure où le changement climatique aggrave l'impact des catastrophes naturelles liées aux conditions météorologiques, il est susceptible d’entraîner des pertes de revenus et de productivité substantielles sur le long terme. L'élévation du niveau de la mer pourrait engloutir des terres productives et le stress thermique pourrait réduire les récoltes.
Une étude de l'UCL prévoit que d'ici 2100, le PIB mondial pourrait être inférieur de 37 % à ce qu'il serait sans les effets du réchauffement climatique. Les économies d'Asie seraient les plus durement touchées. Dans le pire des scénarios, la Chine verrait son PIB fondre de près de 24 %, la première économie mondiale (les États-Unis) d’environ 10 % et l'Europe près de 11 %.
Enfin, concernant le coût de l'inaction, il faut tenir compte des aspects sanitaires de la hausse des températures, de la pollution de l'air, de l'eau et des sols, et d'autres conséquences du dérèglement climatique. Selon les estimations du NRDC, les coûts sanitaires annuels liés au changement climatique et à l'utilisation des combustibles fossiles s'élèvent à plus de 820 milliards de dollars par an aux États-Unis. Imaginez ce qui serait possible de faire pour améliorer les conditions de vie si ne serait-ce qu’une partie de cet argent était disponible.
Bien avant que les températures moyennes n’explosent vraiment, la gravité et la fréquence des événements extrêmes vont probablement augmenter. L'Angleterre, habituée à la pluie, a subi des températures de 40°C et une sécheresse cet été.
N'ignorez pas les événements extrêmes
Les gens ont tendance à ignorer les événements extrêmes, mais ceux-ci augmentent rapidement et vont accroître le nombre d'incendies, de vagues de chaleur, de sécheresses et de pressions sur les réserves alimentaires - et pas dans un avenir lointain. Attendez-vous à une augmentation des décès et des déménagements, des événements qui peuvent être sources de conflits.
La loi américaine sur la réduction de l'inflation pourrait, à juste titre, changer la donne. Les États-Unis sont le deuxième émetteur de gaz à effet de serre au monde et cette loi intervient alors que la sécurité énergétique est devenue un sujet bien plus brûlant que ces dernières années, sans compter l’absolue nécessité d'une action climatique déterminée.
La promulgation de cette loi pourrait relancer l'action mondiale en faveur du climat, en permettant aux États-Unis de retrouver de la crédibilité en tant que partenaire international dans la lutte contre le changement climatique, alors que la COP27 se profile d’ici la fin de l’année.
En matière d’investissement, l’actualité législative américaine, l’adoption récente par l'Australie d'un projet de loi visant à réduire les émissions du pays de 43 % par rapport aux niveaux de 2005 d'ici 2030 et, enfin, l’approbation par le gouvernement indien de la nouvelle CDN du pays, pourraient offrir de nouvelles opportunités dans les énergies propres, aux États-Unis, mais aussi partout ailleurs.
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BNP Paribas Energy Transition est un compartiment de BNP Paribas Funds, SICAV de droit luxembourgeois conforme à la directive 2009/65/CE. Ce produit a pour objectif l’investissement durable au sens de l’article 9 du règlement UE 2019/2088. Un investissement durable signifie un investissement dans une activité économique qui contribue à un objectif environnemental (mesuré, par exemple, par des indicateurs clés d’efficacité des ressources sur l’utilisation de l’énergie, des énergies renouvelables, des matières premières, de l’eau et de la terre ou un investissement dans une activité économique), ou qui contribue à un objectif social (en particulier un investissement qui contribue à lutter contre les inégalités, à favoriser la cohésion sociale ou l’intégration sociale). Ce produit intègre des caractéristiques extra-financières dans son processus d’investissement selon une approche fondée sur un engagement significatif au sens de la position-recommandation AMF 2020-03.
[1] Source : Selon les statistiques du BLS consultables ici https://www.in2013dollars.com/Electricity/price-inflation/2021-to-2022?amount=100
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