La Cour de cassation vient parfois en aide à des héritiers devenus associés malgré eux (1) et, tel est le cas de 3 membres d’un GFA (Groupement Foncier Agricole) devenus associés par le jeu de la dévolution successorale.
L’article L322-23 C. Rural dispose très clairement que le retrait d’un associé ne peut être autorisé, à défaut de précisions statutaires, que par une décision unanime des associés.
Il apparait que cette décision unanime fait défaut en l’espèce. Les 3 membres demandent donc au juge de constater leur retrait judiciaire.
Naturellement, les autres associés du GFA s’y opposent. La Cour d’appel accueille pourtant la demande des associés – héritiers. Le GFA forme un pourvoi en cassation.
Le raisonnement des associés du GFA parait pourtant cohérent. En effet, si on se fonde sur l’article du code rural précité, le juge est dans l’impossibilité d’autoriser un retrait judiciaire dans la mesure où le droit spécial prime sur le droit commun. (2)
Or la Cour d’appel, qui sera suivie par la Cour de cassation, n’est pas de cet avis. Pour les juges, empêcher un associé ayant acquis ce statut malgré lui, constitue une atteinte disproportionnée à son droit de propriété.
La Haute Cour précise en outre que si la Convention européenne des droits de l’homme permet, en son article 6 §1 de limiter l’accès à la justice dès lors que des conditions légitimes le justifient, il revient aux juges de vérifier que la restriction à ce droit ne constitue pas, pour autant, une atteinte démesuré à un autre droit, en l’espèce le droit de propriété.
In fine, on retient que les héritiers peuvent donc sortir du capital du GFA.
Cela dit on observe que la Cour de cassation a balayé d’un revers de mains l’argument selon lequel ces retraits seraient contraires aux objectifs de politique agricole poursuivis par le GFA, cet argument étant nouveau et la Cour de cassation n’ayant pas vocation à juger les faits mais seulement le droit.
En aurait-il été autrement si l’argument avait été invoqué au début de la procédure ? (3)
EF/YK
Voir aussi
- Cass. civ. 1, 01-03-2017, n° 15-20.817, FS-P+B+I
- Comprendre par-là que les dispositions du code rural prime par rapport à la possibilité de demander le retrait d’un associé en justice ( Articles 1869 et 1845 du code civil pris ensemble)
- Décision en sens contraire : (Cass civ 1 n° 09-65995)