Donner c’est donner. Et pourtant les donations entre époux faites avant le 1er janvier 2005[1] sont librement révocables. Encore faut-il pouvoir en prouver l’existence.
Les faits sont les suivants : deux époux sont mariés sous le régime de la séparation de biens. Le mari effectue deux virements au profit de son épouse pour un montant d’environ 76.000 euros afin de compenser les maigres revenus à la retraite de cette dernière.
L’épouse décède et laisse pour lui succéder son conjoint et 3 enfants issus d’un premier mariage. Des conflits surviennent lors des opérations de liquidation et de partage. L’époux entend demander la révocation de la donation (constituée par les deux virements), cette dernière étant librement révocable puisque consentie avant le 1er Janvier 2005.
La Cour d’appel, confirmant la décision de première instance, considère que ces virements sont constitutifs d’une donation indirecte, l’intention libérale étant démontrée par les circonstances de l’espèce. De fait, la succession est redevable envers l’époux de la somme litigieuse au titre de la révocation de la donation.
Or, pour la Cour de cassation, il ne peut y avoir de révocation d’une donation… qui n’existe pas !
En effet « une donation indirecte suppose un élément matériel lequel consiste en une transmission de valeur du patrimoine du disposant au patrimoine du gratifié ». Or, la Cour d’appel a elle-même constaté que l’encaissement d’une des deux sommes ne résulte d’aucune pièce comptable. Par suite, il n’est pas démontré que ces deux virements ont enrichi le patrimoine propre de l’épouse.
En conclusion, si la possibilité de révoquer des donations antérieures à 2005 même après le décès de la donataire n’est pas contestée, il n’en demeure pas moins qu’un élément matériel doit attester de l’acte d’enrichissement.
EF/YK
Voir aussi
[1] Par principe les donations ne sont pas révocables sauf cas spécifiques (Art 1096 C.civ). Mais les donations consenties avant le 1er janvier 2005 demeurent librement révocables ad nutum (Art 47 III Loi n°2006-728 du 23 juin 2006 portant réforme des successions et des libéralités complétant la loi n° 2004-439 du 26 mai 2004 relative au divorce).