Le code civil prévoit en son article 595 que l’usufruitier ne peut agir sans le consentement du nu-propriétaire s’agissant des baux ruraux ou commerciaux. Mais qu’en est-il lorsque le nu-propriétaire consent un bail rural sans l’accord de l’usufruitier ?
Dans les faits, un homme lègue la nue-propriété de terres agricoles à l’un de ses fils et l’usufruit à son épouse de façon à ce qu’elle puisse « y vivre et en profiter de son vivant ». Le fils donne à bail les terres agricoles sans le concours de sa mère. Cette dernière intente une action en nullité du bail et demande l’expulsion du preneur des terres. Elle décède en cours d’instance et le second fils, devenant héritier, poursuit la procédure.
Le demandeur obtient gain de cause. Par conséquent, le preneur du bail est expulsé des terres. Il forme un pourvoi en cassation.
La Haute juridiction ne suit pas la décision des juges d’appel. Pour la Cour de cassation, le décès de l’usufruitier fait naitre sur la tête du nu-propriétaire la pleine propriété du bien. En conséquence il est impossible que le fils, reprenant l’action en nullité de sa mère, poursuive l’instance, puisqu’il n’a pas qualité à agir.
Résumons : si l’usufruitier donne à bail (rural ou commercial) sans l’accord du nu-propriétaire, l’acte encours la nullité. L’action en nullité appartient au nu propriétaire (Civ 3eme 26/01/72 – note 1). Par ailleurs, la mort de l’usufruitier ne prive pas le nu propriétaire de son droit d’agir en nullité (Civ 3ème 9/12/2009).
A l’inverse, comme dans le cas présent (la situation est plus rare en pratique), le nu-propriétaire qui agit sans le consentement de l’usufruitier porte atteinte au droit de ce dernier, soit « la possibilité de jouir des choses » (art 578 C.civ). Dans ce cas, l’action en nullité n’est plus possible après la mort de l’usufruitier dans la mesure où la pleine propriété est réunie sur la tête du nue propriétaire, comme l’indique la Haute juridiction.
EF/FL
Voir aussi
- « L'infraction à la règle impérative de l'art. 595, al. 4, est de nature à entraîner la nullité du bail à l'égard du nu-propriétaire, qui peut invoquer celle-ci sans attendre la fin de l'usufruit. »