Cet arrêt du 11 octobre dernier sonne un peu comme une mise en garde : un engagement doit être honoré.
En l’espèce, un père laisse pour lui succéder 3 enfants, dont un fils qu’il a reconnu tardivement. Les deux filles sont désignées bénéficiaires de la succession par testament établi avant la reconnaissance du fils. Durant les opérations de partage, les filles ont rédigé un acte sous seing privé aux termes duquel elles s’engagent à remettre à leur frère 1/3 des actifs composant la masse successorale. Mais le partage n’arrivant pas, le fils porte le litige devant les tribunaux.
La question est de savoir si cet engagement peut faire l’objet d’une exécution forcée. Pour ce faire, les juges doivent définir si l’acte couvre une obligation civile ou une obligation naturelle. Rappelons brièvement que l’obligation civile est susceptible d’exécution forcée alors que l’obligation naturelle, qui a pour origine un devoir de conscience, ne l’est pas.
Les sœurs ne reconnaissent naturellement aucune force juridique à l’acte et affirment que le fils « n'avait pas été injustement omis du testament de son père en raison d'une reconnaissance tardive, mais volontairement écarté par celui-ci ». Elles soutiennent pour le surplus que l’acte ne peut être qualifié de donation faute d’avoir été fait par acte authentique.
Mais la Cour d’appel relève que cet acte est « l'expression de la volonté claire et précise des [sœurs] de partager les actifs successoraux (…) », d’autant que l’intention de gratifier le frère a été réitérée par courriel. Cet acte « traduit non pas une intention libérale, mais la reconnaissance d'une obligation naturelle et d'un devoir de justice envers leur frère (…) ».
In fine, les juges, appliquant la jurisprudence constante en matière d’obligation naturelle (1), relèvent que l’obligation naturelle s’est muée en obligation civile par la simple signature de l’acte litigieux (peu importe le formalisme), entrainant de fait l’exécution forcée.
EF/FL
Voir aussi
- « L'engagement unilatéral pris en connaissance de cause d'exécuter une obligation naturelle transforme celle-ci en obligation civile. » Civ. 1re, 4 janv. 2005 - « Une obligation naturelle non transformée en obligation civile ne peut faire l'objet d'une exécution forcée. » Civ. 1re, 14 févr. 1978