Il peut être conseillé, lorsqu’un couple adopte le régime de la séparation de biens, d’adjoindre une société d’acquêts assortie d’une clause d’attribution intégrale au conjoint survivant. Cette technique permet d’introduire ainsi une dose de communauté dans un régime séparatiste ; l’objectif étant de constituer une base d’enrichissement patrimoniale commune.
Or, la vigilance est requise sur les biens à mettre dans la société d’acquêts, surtout en présence d’enfants issus d’un premier mariage.
Ici, la société d’acquêts se compose des biens professionnels des époux, notamment d’un fonds de commerce dans lequel ils exercent tous deux leur activité professionnelle. L’époux décède laissant pour lui succéder son épouse, un enfant commun puis deux autres enfants issus d’un premier lit. Ces derniers contestent la société d’acquêts. Globalement, il s’agit pour ces enfants d’obtenir leur part du gâteau en contestant la nature de biens communs à ceux inclus dans la société d’acquêts.
De fait, la Cour d’appel ne tient pas compte de la société d’acquêts et de la clause d’attribution intégrale, pourtant très clairement rédigées (1). Pour les juges, le fonds de commerce objet du litige ayant été créé avant le mariage par l’époux constitue un bien propre. La Cour d’appel n’argumente pas plus sur le sujet. L’équation est simple : le bien est créé avant le mariage, il s’agit d’un bien propre, peu importe la société d’acquêts.
Et, cette position sera suivie par la Cour de cassation. Selon la Haute juridiction, l’époux qui apporte un bien personnel à la société d’acquêts concède un avantage matrimonial à l’autre. Or, l’art. 1527 c.civ. permet aux enfants issus d’un premier lit de faire une action en retranchement des avantages matrimoniaux. En clair, le bien en question est perçu comme une libéralité au-delà des droits légaux des enfants dans la succession de leur père. Par suite, ce bien doit être réintégré dans la masse successorale pour le calcul de la réserve.
EF/FL
Voir aussi
- « Les biens qui composeront ladite société d'acquêts sans exception appartiendront en pleine propriété au survivant sans que les héritiers ou représentants du prédécédé puissent prétendre avoir droit à la reprise des apports et capitaux entrés du chef de celui-ci dans la société d'acquêts »