La Chambre commerciale de la Cour de cassation, dans un arrêt du 11 mars 2020 vient de rappeler, à propos d’un contentieux DTD, que le paiement de l’impôt à la suite d’une rectification fiscale ne constituait pas en tant que tel, un dommage indemnisable sauf à établir que mieux informé ou conseillé, le contribuable n’aurait pas payé l’impôt ou aurait payé un impôt moindre (précédemment Cass. civ. 1ère 4/11/2003 pourvoi N°00-21.044, et 16/01/2013 pourvoi N°12-13.014).
En l’espèce, l’investisseur DTD ayant assigné son CGP pour défaut d’information et de conseil, ne rapportait pas la preuve qu’il aurait pu investir dans une autre opération de défiscalisation. En effet, il avait indiqué, dans ses écritures d’appel, qu’il n’aurait pas investi dans l’opération DTD s’il avait été mieux informé sans mentionner la possibilité d’une solution alternative ; par conséquent, il aurait payé l’IRPP dans son intégralité !
La Cour de cassation a donc prononcé la cassation partielle de l’arrêt rendu par la Cour de d’Appel de VERSAILLES du 29 mai 2018 qui avait condamné solidairement le CGP et son assureur RCP à payer l’intégralité du supplément d’impôt outre les intérêts de retard et majorations.
Dans une autre affaire, la CA de BORDEAUX précisait dans un arrêt du 14/03/2014 : « le fait de devoir régler des impôts, en application de la législation applicable, ici l'ISF, n'est pas en soi constitutif d'un préjudice qui pourrait être indemnisé par l'expert-comptable,
Que ce préjudice subi par le client de l'expert-comptable, ici constitué par la perte de la chance de faire évoluer ses placements dans un sens différent, afin de réduire les revenus à prendre en compte dans le calcul du plafonnement de l'ISF, n'est donc pas égal au montant des droits qu'il a dû régler à l'administration fiscale à la suite du redressement ».
Dans un arrêt du 2/12/2013, la CA de TOULOUSE allait encore loin en rappelant que le préjudice causé à la suite de la notification d’un redressement de l’administration fiscale ne saurait résider dans le paiement de l’impôt dû, qui ne constitue pas un préjudice, ni dans les intérêts afférents à cette somme, qui correspondent à la contrepartie de la jouissance des fonds par le contribuable alors qu’ils devaient revenir au fisc qui en a été privé.
En réalité, le préjudice allégué par le contribuable ne pourrait s’analyser qu’en une perte de chance. Perte de chance pouvant être égale à zéro.
En effet, il est de jurisprudence constante que le préjudice résultant d’un manquement à une obligation d’information et/ou de conseil s’analyse en une perte de chance de prendre une décision plus judicieuse en toute connaissance de cause.
Ce principe de perte de chance a été rappelé à de nombreuses reprises par la Cour de cassation (Cass. com. 4 février 2014, Bull. IV n° 28, pourvoi n° 13-10.630, Cass. com. 22 novembre 2017, pourvoi n° 16-15.756 ; Cass. com. 25 novembre 2014, pourvoi n°13-18.414).
La réparation accordée au titre d’une perte de chance ne peut être évaluée au montant de l’avantage qui aurait été procuré si elle s’était réalisée ; la Cour de cassation a fait application de ce principe dans un arrêt du 4/07/2019 (Cass. civ. 3ème 4/07/2019, pourvoi n° 17-27.743).
Auteure : Me Dounia HARBOUCHE – Avocat au Barreau de Paris – 6 avril 2020
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