Il ne fait nul doute, à notre avis, que 2022 a été une «annus horribilis» pour le marché obligataire. L’envolée des taux d’intérêt à travers le monde a entraîné la chute des prix des obligations, n’épargnant ni les emprunts d’État, ni les crédits aux entreprises de première qualité, ni les titres à haut rendement plus risqués.
À quelques mois de la fin de l’année 2023 cependant, les perspectives sont bien différentes. Les obligations ont renoué avec des rendements considérablement plus élevés, tous secteurs confondus, sur fond de conviction croissante que les cycles de relèvement des taux des banques centrales approchent de leur fin.
Dans ce contexte, bien que les perspectives d’investissement soient désormais relativement plus favorables quels que soient les instruments obligataires considérés, certains secteurs du marché sont plus attrayants que d’autres, les obligations à courte duration s’avérant particulièrement intéressantes.
Courbes de rendement inversées
L’un des principaux facteurs ayant contribué à la situation actuelle est le fait que les courbes de rendement demeurent inversées. Dans des conditions de marché normales, les rendements des obligations à long terme sont, en toute logique, supérieurs à ceux des obligations à court terme. Les obligations à long terme, lorsqu’elles sont détenues jusqu’à leur échéance, ne permettent de récupérer l’investissement initial qu’au terme d’une période plus longue, sont associées à des risques plus élevés et devraient donc récompenser les investisseurs par des rendements supérieurs.
Or, dans les conditions actuelles du marché, la situation est inversée: les rendements des obligations à un an sont supérieurs à ceux des obligations associées à des échéances à 10 ou 30 ans. Le facteur à l’origine de cette inversion est l’anticipation d’une baisse des taux par les banques centrales, après de nombreux mois de relèvements successifs, destinée à éviter éventuellement un atterrissage brutal de leurs économies. Nous pensons que cette situation a donné un coup de fouet considérable aux rendements des obligations à court terme.
La Réserve fédérale américaine n’a certes pas modifié ses taux en septembre, mais cette décision intervient après onze relèvements de ses taux directeurs (le dernier à hauteur de 25 points de base en juillet) dans le cadre de ses efforts pour juguler l’inflation. Il en résulte une fourchette du taux cible des fonds fédéraux située entre 5,25 % et 5,50 %.
Entre temps, Christine Lagarde, présidente de la Banque centrale européenne, a annoncé fin septembre que bien que les coûts d’emprunt aient peut-être atteint leur pic, ils ne baisseront pas avant que l’inflation ne soit maîtrisée.
À la mi-septembre, la BCE avait relevé ses taux d’intérêt de 25 points de base pour les porter à 4 %, un niveau record depuis la création de la zone euro.
L’aplatissement actuel des courbes de rendement signifie que, dans l’ensemble, le crédit à plus long terme ne génère aucun rendement supplémentaire. Dans de telles circonstances, pourquoi prendre un risque de capital supplémentaire lorsqu’il est possible d’obtenir le même rendement avec des obligations à court terme?
Plaidoyer en faveur des obligations d’entreprises à court terme
Nous avons constaté que des rendements encore plus importants sont possibles avec des obligations d’entreprises à court terme. De plus, en associant duration faible et qualité de crédit élevée, les investisseurs peuvent bénéficier de rendements très attrayants sans s’exposer à des risques de capital élevés, même si l’éventualité d’une récession mondiale devait se concrétiser.
Nos stratégies Investment Grade visent à générer des rendements réguliers ajustés au risque en limitant l’univers d’investissement principalement à des titres qui sont considérés comme étant de qualité supérieure et moins exposés au risque de défaut.
En ce moment, les obligations d’entreprises à court terme présentent un attrait supplémentaire dû à l’aplatissement actuel des courbes de rendement, ce qui signifie, en jargon technique, que les «seuils de rentabilité» sont maximisés.
Une caractéristique spécifique de l’aplatissement actuel des courbes de rendement réside dans le fait que les indices de crédit Investment Grade de différentes échéances offrent des rendements identiques, une situation extrêmement rare.
Si les rendements sont identiques, il va de soi que les durations ne le sont pas, ce qui signifie que le «seuil de rentabilité» de chaque indice est radicalement différent. Le seuil de rentabilité est un concept simple: il désigne l’augmentation de rendement nécessaire pour obtenir une perte en capital correspondant exactement et inversement au rendement actuel de cette obligation (ou de cet indice ou de ce portefeuille). En d’autres termes, la question qui se pose est de savoir de combien le rendement doit augmenter pour qu’une perte en capital compense exactement une année de rendement.
Par Chris Bowie, Partner, Portfolio Management.
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