Cette semaine à la une, nous nous penchons sur la réaction à un grand pari d'Emmanuel Macron et sur la dernière réunion du Comité fédéral de l'open market américain (FOMC).
On dit que les investisseurs n'aiment pas les surprises. Généralement, cela se traduit par une sous-appréciation des primes de risque et les prix des actifs réagissent en conséquence. Les actifs considérés comme des valeurs refuges surperforment, les obligations d'État telles que les Bunds allemands et les bons du Trésor américain figurant parmi les principaux bénéficiaires, de même que le dollar américain et l'or. À l'inverse, l'épicentre de l'inquiétude sous-performe généralement.
Les deux causes de surprise de la semaine dernière ont été le président français, Emmanuel Macron, et la Réserve fédérale américaine (Fed).
Après les résultats décevants du Parti Renaissance d’Emmanuel Macron aux élections européennes et les bons résultats du Rassemblement National d'extrême droite, dirigé par Marine Le Pen, Macron a pris la décision surprise, le 9 juin, de dissoudre l'Assemblée nationale et de convoquer des élections législatives anticipées.1 Les élections se dérouleront en deux tours, le 30 juin et le 7 juillet, juste avant l'ouverture des Jeux olympiques de Paris. Pour obtenir la majorité, il faut 289 sièges sur 577.
Le pari de Macron
Dans une interview accordée au Figaro, M. Macron a insisté sur le fait que, quoi qu'il arrive, le résultat n'affecterait pas sa position et qu'il resterait président. Toutefois, les premiers sondages suggèrent que cette stratégie à haut risque visant à renforcer le soutien à son parti Renaissance pourrait se retourner contre lui.2 Le Rassemblement National devrait l'emporter, mais sans atteindre la majorité absolue. Et, après que les Verts, les Socialistes, les Communistes et le parti d'extrême gauche La France insoumise aient annoncé qu'ils se présenteraient aux élections en tant que groupe unique, les sondages les placent actuellement en deuxième position (voir le graphique de la semaine).
À moins d'un changement dans le sentiment des électeurs, de nombreux candidats de Renaissance pourraient ne pas atteindre le second tour, ce qui déboucherait sur un gouvernement de cohabitation, le premier ministre et le président étant issus de partis différents.
La France a connu trois gouvernements de cohabitation, le dernier ayant gouverné de 1997 à 2002. Aucun parti ne disposant d'un mandat clair, il pourrait être extrêmement difficile pour la France de mettre en œuvre les mesures d'austérité nécessaires pour se conformer au cadre budgétaire de l'Union européenne, dans lequel les États membres sont tenus de mettre en place des plans visant à ramener les déficits à 3 % du PIB et la dette publique à 60 % du PIB.3 Selon une récente publication de l’INSEE, le déficit public de la France atteindra 5,5 % du PIB à la fin de 2023, avec une dette publique de 110,6 % du PIB.4
Le 31 mai, S&P Global a abaissé la note de crédit à long terme de la France de AA à AA-, invoquant des inquiétudes quant à la détérioration de sa situation budgétaire.5
Au cours d'une semaine généralement décevante pour les actions européennes, l'indice de référence français CAC 40 a été le moins performant, chutant de plus de 6 %. Pendant ce temps, les rendements des obligations d'État françaises à 10 ans ont augmenté de 7 points de base (pb) ; les Bunds allemands ont suivi la direction inverse, baissant de 13 pb.
Le FOMC revoit ses prévisions
La surprise suivante est venue de la réunion du Federal Open Market Committee (FOMC) de la Fed le 12 juin, qui a noté que l'activité économique a continué à croître à un rythme soutenu, mais qu'il n'y a eu que du "progrès modeste" vers l'objectif d'inflation de 2 % du Comité.6 Ce commentaire est en contradiction avec les données disponibles.
Les projections du FOMC ne signalent plus qu'une seule réduction de 25 points de base des taux cette année (4 membres sont en faveur d'aucune réduction, 7 en faveur d'une réduction et 8 en faveur de deux réductions). Cela contraste fortement avec les trois baisses prévues par le FOMC en mars et est inférieur au consensus du marché qui prévoyait deux baisses.
Le taux de chômage devrait se situer à la fin de l'année au niveau actuel de 4 %, un niveau que nous considérons comme propice à un changement de la politique de la Fed si l'on tient compte des autres données peu encourageantes sur l'emploi publiées récemment. Au cours de la semaine qui s'est terminée le 8 juin, les demandes initiales d'allocations chômage, une mesure que nous suivons de près, ont augmenté de 13 000 par rapport à la semaine précédente pour atteindre 242 000, le niveau le plus élevé de l'année.7
Le FOMC a laissé ses prévisions de croissance pour 2024 inchangées à 2,1 %. La croissance du premier trimestre étant fixée à 1,3 %, cela signifie que l'économie enregistrera une croissance de 2,4 % au cours de chacun des trois trimestres restants. Toutefois, le consensus de Bloomberg pour la croissance du PIB est de 2,1 % pour le deuxième trimestre, de 1,7 % pour le troisième trimestre et de 1,6 % pour le quatrième trimestre.
Entre-temps, le FOMC a revu à la hausse ses prévisions d'inflation pour 2024 en ce qui concerne les dépenses personnelles de consommation de base (PCE), les faisant passer de 2,6 % à 2,8 %. Cela reflète l'impulsion inflationniste saisonnière observée au premier trimestre. L'indice de base des dépenses de consommation peut augmenter de 0,185 % en glissement mensuel pendant le reste de l'année pour atteindre l'estimation de la Fed. Après une inflation des prix à la consommation plus faible que prévu et une baisse surprenante de 0,2 % en glissement mensuel des prix à la production,8 le consensus pour les chiffres PCE du mois de mai est en légère augmentation à 0,1 %.
Le mandat de la Réserve fédérale est de "promouvoir efficacement les objectifs d'un niveau d’emploi maximum, de prix stables et de taux d'intérêt modérés à long terme". Avec des données plus faibles sur l'emploi et une inflation sous contrôle, nous ne pourrions pas en vouloir aux investisseurs de se demander si les prévisions du FOMC ne semblent pas rétrogrades.
Source : Source : PolitPro, au 14 juin 2024. À des fins d'illustration uniquement.
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