Pour le profane, il s’agit d’une information capitale, si ce n’est la donnée la plus percutante contenue dans son offre de prêt. Son calcul comprend en effet tous les coûts supportés par le client, qu’il s’agisse de frais de dossier, de frais de garantie, de coût des intérêts et assurances, ou autres. C’est la donnée déterminante du choix du client de se tourner vers un établissement de crédit plutôt que vers un autre. C’est donc tout naturellement que le juge accorde un intérêt très particulier à cette mention qui aiguillonne le choix du client, et dont le contentieux est malheureusement et fort logiquement très fourni !
Du client qui argue le vice du consentement pour erreur, à celui qui tente purement et simplement de se faire rémunérer par la banque en demandant l’application d’un taux d’intérêt devenu négatif à son crédit immobilier à taux variable (Cass. 1ère Civ., arrêt N°18-23 803, 25 mars 2020), tout y passe ! Quand l’erreur affectant le TEG est susceptible d’être sanctionnée dès lors qu’elle est supérieure à la décimale (R.313-1 du Code de la consommation) et quand les coûts qui entrent dans son calcul sont nébuleux et assez souples dans leur interprétation, c’est du pain béni pour le client procédurier ou juste de mauvaise foi.
Désormais, c’est fini ! Clap de fin. La Cour de cassation a en effet, dans un arrêt récent du 10 juin 2020 (Cass. 1ère Civ., arrêt N°430, 10 juin 2020 - avis n°15004, JurisData N°2020-007999), opéré un virage à 360 degrés dans sa façon de sanctionner l’erreur, l’omission ou l’irrégularité pouvant affecter le TEG : désormais, le juge du fond est missionné d’apprécier et peser la gravité de l’erreur ou de l’irrégularité ainsi que sa répercussion préjudiciable pour le client, et de déchoir en conséquence le prêteur de ses intérêts. Qu’est-ce que cela change ? Tout.
Cette sanction, qui existait déjà mais n’était pas automatiquement retenue, est respectueuse de la préservation de l’équilibre du contrat de prêt : elle permet au juge de faire la mesure du préjudice réellement subi par le client qui n’avait pas à sa disposition, au moment où s’est nouée la relation contractuelle avec l’établissement de crédit, toutes les clés nécessaires pour faire un choix libre et éclairé. C’est un outil de correction du contrat de prêt, là où la substitution du taux d’intérêt légal jusqu’alors également appliquée était un véritable outil de refonte du contrat, souvent spoliatrice pour la banque.
Le client qui conteste à tout-va ne sera donc plus la némésis du banquier et cessera de donner des sueurs froides aux établissements de crédit ! Seule crainte à avoir, et c’est là où la solution proposée trouve ses limites : la déchéance totale, qui priverait le prêteur de tout droit aux intérêts et lui ferait donc supporter un prêt gratuit. Mais que les banques se rassurent car, hors erreurs gravissimes, ce cas de figure semble relever du cas d’école et resterait très marginal.
Ainsi, si l’étourdi récidiviste et le banquier consciencieux doivent continuer de veiller sur le TEG qu’ils manient, calculent et visent dans leurs contrats, le juge saura désormais faire preuve de plus de justesse dans son examen. De quoi retirer à leur vigilance un peu de sa paranoïa.
Par Alejandra Urdaneta
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