Il est désormais établi que la croissance, que nous annonçons depuis plusieurs mois, est en phase d’accélération dans le monde.
L’Europe est en retard par rapport à la Chine et aux Etats-Unis en raison d’une situation sanitaire encore préoccupante, mais tout indique que le second semestre mettra fin à cette différence. Cette croissance planétaire est une bonne nouvelle après le choc inédit provoqué par la pandémie du coronavirus. Elle sera toutefois génératrice de déséquilibres dont nous devrons tenir compte dans nos allocations.
La croissance est la somme de différents facteurs tels que la consommation, la production, l’investissement, le commerce ou l’immobilier. Certains de ces facteurs sont liés, entrainant un cercle vertueux d’activité. La consommation entraîne la production qui incite les entreprises à investir. La croissance coordonnée avec d’autres pays favorise également le commerce. Mais ce cercle vertueux peut aussi basculer vers un chemin plus difficile, si l’un de ces paramètres vient à faire défaut. Ainsi, si l’appareil de production d’un pays est insuffisant, la consommation ne peut plus être assouvie au niveau national et les déséquilibres commerciaux apparaissent. Ou encore, si les stocks immobiliers sont trop faibles pour faire face à la demande, il en résulte une hausse des prix qui pèsera à terme sur l’inflation et les taux d’intérêt.
Cette situation est celle que semble vivre l’Amérique aujourd’hui. Les Etats-Unis n’ont pas les capacités de production nécessaires dans le domaine manufacturier pour répondre à la demande. Les niveaux de stocks très bas ne donnent pas de marge de manœuvre. Cette faiblesse de l’industrie débouche inéluctablement sur une augmentation du déficit commercial, notamment avec « l’ennemi » chinois. A ce titre, le président Trump a totalement échoué dans son entreprise de rééquilibrage commercial avec la Chine.
Le paradoxe actuel avec les Etats-Unis vient d’une reprise vigoureuse de la croissance qui remet en lumière le problème structurel récurrent d’un manque de capacités industrielles, générateur de déficit commercial. Cela ne va pas faciliter les relations bilatérales avec la Chine. Si le plan de relance de Joe Biden est adopté, il ne fera qu’accentuer ce phénomène à court terme. La locomotive américaine est lancée à toute vapeur et c’est une très bonne nouvelle pour l’activité mondiale. Attention toutefois aux effets collatéraux qu’elle peut entraîner.
La Chine profite donc de la croissance de son rival. Pourtant on note une stabilisation des principaux agrégats économiques après des mois de forte hausse. Cette tendance est un phénomène naturel, la reprise étant toujours plus forte au début, mais elle ne remet pas en cause l’activité globale. Une croissance trop forte n’est d’ailleurs pas souhaitable car elle se transforme en surchauffe qu’il faut ensuite maitriser.
L’Europe a encore du retard par rapport à ces deux locomotives en raison d’une campagne de vaccination plus lente. Mais la direction est la même. La croissance est d’ailleurs déjà assez résiliente en dépit des reconfinements du premier trimestre (par exemple la croissance en France qui s’affiche à 0,4% au premier trimestre contre 0 attendu). L’épargne abondante des ménages et des entreprises laisse augurer une reprise vigoureuse au second semestre.
Les marchés financiers sont aujourd’hui à un niveau où beaucoup de bonnes nouvelles sont désormais intégrées et où les mauvaises surprises sont sanctionnées. On le voit bien dans la séquence de publication des résultats trimestriels des sociétés. Le plus souvent les bénéfices sont au-dessus des estimations (voire largement supérieurs par exemple pour les grandes technologiques américaines), mais cela n’entraîne pas toujours une réaction identique du cours de bourse, les investisseurs estimant les valorisations déjà hautes. Cela se traduit par un marché plus hésitant qui pourrait souffler à court terme. Tout repli significatif sur les entreprises de qualité sera en revanche une occasion d’achats selon nous. Nous adoptons un biais un peu plus prudent à court terme tout en restant conscients qu’à ce jour le marché actions est celui qui offre clairement les perspectives de rémunération les plus intéressantes.
Par Emmanuel Auboyneau, Gérant Associé
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