Marc Halperin, gérant du fonds Edmond de Rothschild Euro Sustainable Growth (FR0010505578), vise un ISR pragmatique.
Est-ce que l’ISR n’est pas parfois un peu un cache-sexe moral ?
Je ne crois pas, en tout cas pas chez nous. Notre fonds EdR Euro Sustainable Growth est ISR depuis l’origine en 2009. Il ne s’agit donc pas d’une offre opportuniste pour répondre à l’air du temps. Avec EdR Tricolore Rendement par exemple, nous sommes en présence d’un fonds d’engagement. L’engagement est une des notions au cœur de l’ISR tel que nous l’envisageons. L’engagement vise pour nous à faire évoluer les pratiques, c’est ce que nous avons fait par exemple avec Sanofi en ce qui concerne la gouvernance suite au départ de Chris Viehbacher.
Quelle est votre approche de l’ISR ?
Nous ne sommes pas sur le principe de l’exclusion, notre approche est plutôt de faire évoluer les pratiques. L’ISR chez nous est fondé sur 4 piliers : l’environnement, le social, la gouvernance et les parties prenantes, c’est-à-dire les relations avec les fournisseurs, les clients, les pouvoirs publics, etc. Nous étions sortis de Volkswagen, avec le fonds EdR Euro Sustainable Growth, bien avant que n’éclate le scandale, pas en raison de questions environnementales mais à cause de la gouvernance.
Qui aujourd’hui s’intéresse à l’ISR ?
Nous avons constaté une véritable évolution au fil des années. D’abord au niveau des investisseurs : à l’origine nous avions surtout des mandats institutionnels pour des acteurs tels que l’ERAFP ou l’IRCANTEC, mais les investisseurs individuels sont aujourd’hui actifs sur l’approche ISR.
D’autre part, aujourd’hui les investisseurs veulent concilier rendement et ISR et ne sont pas prêts à sacrifier le premier pour le second. Quand nous investissons dans les turbines éoliennes avec Vestas, ce n’est pas uniquement parce que c’est de l’énergie verte, c’est aussi que l’entreprise est rémunératrice. Pour nous un investissement ISR avance sur 2 jambes : une vraie composante ISR bien évidemment, mais aussi la prise en compte de la dimension financière.
Est-ce qu’on trouve facilement des exemples hors des industries propres ?
Oui bien sûr. Valeo avec sa technologie Stop’n Start, ou encore Tarkett dans le monde du revêtement de sol. Ils sont parmi les premiers à avoir trouvé des solutions de substitution au phtalate. Et aujourd’hui ils sont incontestablement un cran au-dessus de la concurrence en termes d’ISR.
Vous gérez un portefeuille d’actions européennes avec beaucoup de valeurs françaises, un tropisme hexagonal ?
Je pense que la forte présence des valeurs françaises s’expliquent surtout par le fait que la réglementation oblige les entreprises en France à communiquer sur leur engagement ESG, voir l’Article 225 du Grenelle de l’environnement. De ce fait, elles sont sans doute plus en avance.
Last but not least, l’entreprise qui va bien mais qu’on ne veut pas avoir dans un portefeuille ISR ?
Ryanair. C’est une valeur boursière exceptionnelle, avec une excellente stratégie et un long track record. Mais au niveau ISR, l’entreprise est loin des meilleurs standards, tant en ce qui regarde l’emploi que dans ses relations avec les aéroports…
MH/FL