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La satisfaction et l’adhésion des salariés seraient un puissant facteur d’efficacité économique… Analyse avec Bertille Knuckey, gérante du fonds Happy@Work chez Sycomore AM.

Votre fonds a récemment fêté ses 2 ans et affiche de bonnes performances. Est-ce que cela tient réellement à la sélection des titres en portefeuille, ou cela n’est-il pas un peu fortuit ?

Les performances du fonds sont le fruit d’une sélection rigoureuse qui s’appuie sur un travail collectif visant à examiner les entreprises cotées sous un double filtre, financier d’une part et extra-financier d’autre part. Nous appliquons par ailleurs une grille d’analyse sociale exigeante.

Plusieurs travaux ont mis en exergue le lien existant entre performance économique et qualité de l’environnement de travail comme, par exemple, les études conduites par Glassdoor et Gallup sur l’industrie américaine ou encore les travaux de Bernstein et Beeferman de Harvard sur le capital humain. Nous ne sommes donc pas les seuls à l’affirmer.

Sycomore AM fait d’ailleurs partie d’une coalition d’investisseurs (la Human Capital Management Coalition) qui pousse actuellement ce sujet aux Etats-Unis.

Mais comment mesure-t-on le « bonheur au travail » ?

C’est un exercice difficile ! Nous avons élaboré une grille pour évaluer les entreprises selon cinq thèmes indispensables à l’épanouissement du collaborateur. Le sens, qui consiste à voir si l’entreprise s’est fixée une mission à laquelle adhèrent les salariés ; l’autonomie, qui vise, par exemple, à évaluer la capacité de l’entreprise à rechercher des modèles de gouvernance plus participatifs ; les compétences, auxquelles on rattache le développement personnel, la formation, les stratégies de carrière, etc. ;  les aspects relationnels, qui prennent en compte le cadre de travail, le climat social, l’équilibre vie professionnelle / vie privée… Enfin l’équité, qui a notamment pour objectif d’évaluer si les collaborateurs sont associés aux résultats ou encore si l’entreprise fait de la diversité un moteur de performance.

Sur un univers d’investissement défini de 700 valeurs, cette analyse approfondie de la dimension sociale de l’entreprise nous permet d’identifier 250 valeurs parmi lesquelles nous sélectionnons environ 70 valeurs qui constituent le portefeuille.

Un exemple de valeur qui vous semble particulièrement représentatif ?

Salesforce, aux Etats-Unis, qui compte 25.000 collaborateurs et affiche une belle croissance. Le patron, Mark Benioff, est exemplaire et s’intéresse de près à la question de l’épanouissement de ses collaborateurs. L’ensemble des collaborateurs ont droit à sept jours par an pour participer à des missions de volontariat. Cette entreprise concilie satisfaction des collaborateurs et bonnes performances économiques.

Ces entreprises où « il fait bon travailler » se retrouvent-elles systématiquement dans les secteurs de la technologie ou plus généralement dans le secteur tertiaire ?

Non, pas du tout. J’aurais pu vous citer SEB ou encore Michelin. Le cas de Michelin est très intéressant, des projets pilotes ont été mis en œuvre sur plusieurs sites pour tester de nouvelles méthodes de management, beaucoup plus participatives et « responsabilisantes ». Les collaborateurs ont ainsi carte blanche pour choisir leur organisation, leurs formations, leurs méthodes de suivi de la production, ou encore leur responsable d’équipe. 

Que ce soit dans le secteur secondaire ou tertiaire, de plus en plus de managers prennent conscience que les collaborateurs font la richesse de leur organisation.

EF/FL