A en juger par les cartes de vœux kitsch dont nous ne tarderons pas à nous débarrasser, Noël a fait la part belle aux rennes à nez rouge et aux chalets suisses enveloppés d’un épais manteau neigeux. Pourtant, à moins que vous ne viviez à la montagne, vos enfants ont probablement batifolé dans des flaques d’eau sur le bord de la route plus qu’ils n’ont chahuté dans la fraîche poudreuse. Mais malgré cela, on peut rester optimiste : les Etats-Unis font leur retour dans le camp des pays soucieux de leur empreinte carbone et les entreprises innovantes ne manquent pas pour apporter leur écot à la lutte contre les changements climatiques.
Promesses vertes et rêves de Noël blanc
Comme pour compenser les hivers qui se font de moins en moins blancs, les Etats se mettent de plus en plus au vert. En Asie, les trois poids lourds économiques que sont la Chine, le Japon et la Corée du Sud prévoient d’atteindre la neutralité carbone d’ici à quelques dizaines d’années. L’Union européenne a pris un engagement similaire il y a quelques mois de cela. Et peu après le 20 janvier, jour de l’investiture de Joe Biden en tant que 46e président des Etats-Unis, le deuxième plus gros émetteur de CO2 de la planète1 devrait officiellement adhérer à nouveau aux objectifs de l’accord de Paris sur le climat. Consortium d’analystes spécialisé dans la recherche sur le climat, Climate Action Tracker estime qu’au vu de l’évolution récente de la situation, le seuil de deux degrés de hausse des températures fixé par l’accord de Paris est désormais atteignable, alors que les prévisions tablaient jusque-là sur un réchauffement de 2,7 degrés d’ici à 2100, peut-on lire sur le site Internet de la BBC..
Un soutien croissant de la part de la population
Les esprits critiques argumenteront que les promesses environnementales n’engagent que ceux qui les écoutent, sans mettre trop de pression sur les Etats pour qu’ils agissent. Cependant, ces idées nécessitent un soutien bipartite. Aux Etats-Unis, au moins, Joe Biden pourrait être en mesure de concrétiser ses spectaculaires projets autour d’une relance économique verte, maintenant que les démocrates détiennent la majorité dans les deux chambres du Congrès suite à une course aux deux derniers sièges du Sénat âprement disputée dans l’Etat de Géorgie, le 5 janvier.
En tout cas, abstraction faite des considérations politiques, le soutien populaire en faveur de l’action pour le climat s’inscrit globalement en hausse. Maintenant que les grandes puissances économiques asiatiques commencent à s’affirmer en tant que têtes de file dans le domaine, ces pressions prennent incontestablement une dimension plus internationale.
Les gouvernements coordonnent, les entreprises innovent
Les gouvernements et les autorités de réglementation peuvent jouer un rôle majeur dans la lutte contre les changements climatiques, en instaurant par exemple un dispositif par lequel les entreprises peuvent acheter ou vendre des certificats d’émissions de CO2, mettant ainsi un prix sur la pollution. Ce système est déjà en vigueur en Europe dans certains secteurs industriels. Et pourquoi les Etats ne casseraient-ils pas leur tirelire pour planter des millions d’arbres dans le cadre d’une initiative coordonnée à l’échelle internationale ? Quoi qu’il en soit, c’est aux entreprises innovantes que reviendra le travail sur le terrain. Il y a quelques années, auriez-vous imaginé qu’il serait possible de capter le carbone atmosphérique et de le séquestrer en profondeur dans le sol ? Ce sont précisément les techniques qu’applique l’entreprise suisse Climateworks, par exemple.
Certains titres surfent sur la vague du renouvelable
Selon Credit Suisse Research2, le plan de Joe Biden en faveur des énergies propres pourrait avoir l’effet d’une « vague du renouvelable » sur laquelle surferont tous les secteurs connexes, comme les applications solaires dans le résidentiel, les compteurs connectés, les piles à combustible à hydrogène ou encore la production d’énergie renouvelable dans les services aux collectivités. Swiss Re estime qu’une reprise viable nécessiterait un changement de cap qui passerait, entre autres, par un accroissement des investissements dans les infrastructures durables3.
Cela va dans le sens de l’investissement d’impact, une approche visant à constituer un portefeuille d’actions « vertes » et à permettre aux investisseurs d’en mesurer les résultats. Citons par exemple Ørsted, plus grand opérateur de parcs éoliens offshore du monde, qui prévoit de porter sa capacité installée à 15 gigawatts (GW), soit trois fois celle de la plus grande centrale au charbon d’Europe4, d’ici à 2025 (contre 4 GW fin 2017). Une fois que l’entreprise danoise aura fermé ses dernières centrales au charbon d’ici à 2023, son bénéfice d’exploitation proviendra exclusivement de l’énergie verte. Autre exemple : le Californien Equinix, leader mondial dans le domaine des centres de données. Les centres de données permettent une optimisation des capacités de calcul des entreprises, mais leur fonctionnement est très gourmand en énergie. Pour résoudre ce problème, l’entreprise, qui a réduit ses émissions de carbone de 60% depuis 2015, entend se procurer l’intégralité de son énergie à partir de sources renouvelables. Prenez encore Hannon Armstrong, société basée à Annapolis, près de Washington, qui finance les projets liés aux changements climatiques dans des domaines comme la production d’électricité d’origine éolienne ou solaire, ou le stockage d’énergie. Grâce à son accès aux financements, cette entreprise est le modèle même du facilitateur de projets liés au climat et à l’efficacité énergétique pour les entreprises quasi-publiques, mais aussi pour les propriétaires de maisons individuelles souhaitant installer des panneaux solaires sur leur toit. Toutes les entreprises ci-dessus sont des leaders dans leurs domaines respectifs, ce qui se reflète également dans l’évolution du cours de leurs actions.
Vive le vent cleantech !
Il va de soi qu’il ne suffira pas d’investir dans des actions du domaine des « technologies propres » pour sauver la planète. Cependant, les autorités et les entreprises semblent désormais davantage susceptibles de conjuguer leurs efforts pour enrayer la hausse apparemment inexorable des températures. Peut-être insuffisant pour arpenter de nouveau des chemins de neige blanche à Noël, mais assez pour entonner « Vive le vent cleantech », surtout si les investisseurs d’impact continuent de reprendre ce refrain en chœur.
1. Selon l’Union of Concerned Scientists, groupe de scientifiques américain, la Chine émet 28% du CO2 mondial et elle est suivie des Etats-Unis, responsables de 15% des émissions (données au 12 août 2020) https://www.ucsusa.org/resources/each-countrys-share-co2-emissions
2. « Utilities and Alternative Energy, Thoughts on Biden’s Plan », Credit Suisse Research Bulletin, 16 juillet 2020
3.“Rebuilding better”, Swiss Re, Sigma 7/2020 https://www.swissre.com/institute/research/sigma-research/sigma-2020-07.html
4. Avec ses 13 unités de production, la centrale au charbon polonaise de Bełchatów présente une capacité de 5,3 gigawatts selon le site Internet de NS Energy https://www.nsenergybusiness.com
Pour accéder au site, cliquez ICI.