A l'heure où l'Union européenne (UE) durcit le ton en matière de recyclage, les investisseurs peuvent espérer de nouvelles opportunités dans la course à la transition vers une économie circulaire.
L’Europe s’apprête à se diriger à plein régime vers l’économie circulaire. L’UE espère que celle-ci permettra non seulement de réduire les émissions de carbone mais également de renforcer la compétitivité mondiale, de favoriser une croissance économique durable et de créer de nouveaux emplois. Le recyclage est important pour « boucler la boucle », c'est-à-dire pour créer une économie circulaire en récupérant le plus de ressources possible. Les investisseurs auront un rôle important à jouer pour rendre cette transition réalisable.
En 2018, l’UE a convenu de relever ses objectifs de recyclage des déchets, visant à accroître le niveau de déchets municipaux recyclés à 55 % d’ici 2025, à 60 % d’ici 2030 et à 65 % d’ici 2035, tandis que la Directive relative aux emballages et à leurs déchets (94/62/EC) stipulait que les États membres de l’UE devraient recycler au moins 70 % de ces déchets d’ici 2030[1].
En début d’année, la Commission européenne a lancé un ambitieux programme « économie circulaire », qui inclut des propositions législatives révisées en matière de déchets. La Commission a fixé des objectifs clairs en matière de réduction des déchets, ainsi qu’un plan d’action précis relatif à la gestion des déchets, s’appuyant sur une série de mesures visant à éliminer les obstacles potentiels et actuels à sa mise en œuvre dans différents États membres de l’UE.
Réduire les écarts
Si tous les pays de l’UE s’efforcent de respecter ces nouvelles normes, ces dernières années, certains d’entre eux ont fait bien plus de progrès que d’autres dans le renforcement de leurs capacités de recyclage. Par exemple, le graphe ci-après montre combien l’écart de performance dans le recyclage des déchets municipaux est important entre différents pays. En 2017, les taux allaient de 68 % en Allemagne à 0,3 % en Serbie. Six pays (l’Allemagne, la Slovénie, l’Autriche, les Pays-Bas, la Belgique et la Suisse) ont recyclé 50% ou plus de leurs déchets municipaux.
En revanche, cinq autres pays ont recyclé moins de 20 % de leurs déchets, dont deux pays moins de 10 %[2]. Ensuite, certains pays devront travailler davantage que les pays les plus performants pour atteindre les nouveaux objectifs et les nouvelles mesures incitatives de l’UE, et c’est ici que de nombreuses opportunités d’investissement se présenteront. Pour réduire cet écart, certains pays feront probablement appel à des entreprises considérées comme des « moteurs » de l’économie circulaire.
Comparaison entre pays : déchets municipaux recyclés et compostés en Europe
Note : Les taux de recyclage indiquent le pourcentage de déchets municipaux générés qui sont recyclés, compostés et digérés par voie anaérobie, et peuvent également inclure les déchets préparés de manière à être réutilisés. Les changements apportés à la méthodologie de reporting impliquent que les chiffres de 2017 ne sont pas totalement comparables à ceux de 2004 pour l’Autriche, la Belgique, la Croatie, Chypre, l’Estonie, la Lituanie, l’Italie, la Norvège, Malte, la Pologne, la Roumanie, la Slovaquie, la Slovénie et l’Espagne; les chiffres de 2005 ont été utilisés au lieu des chiffres de 2004 pour la Pologne, en raison des changements de méthodologie. Compte tenu des données limitées disponibles, au lieu des chiffres de 2004, ce sont les chiffres de 2003 qui ont été utilisés pour l’Islande, les chiffres de 2007 pour la Croatie, les chiffres de 2006 pour la Serbie et ceux de 2008 pour la Bosnie - Herzégovine. En ce qui concerne l’UE-28, les chiffres de 2004 ont été basés sur les chiffres de 2007 pour la Croatie et les chiffres de 2016 ont été utilisés pour l’Islande et l’Irlande au lieu des chiffres de 2017. Les chiffres de 2017 pour Chypre, l’Allemagne, la France, le Luxembourg, la Pologne, la Slovénie, l’Espagne, la Suisse, la Turquie et l’UE-28 incluent des estimations.
Source : Agence européenne pour l’environnement, 22 novembre 2019.
Des exemples de réussite en matière de recyclage concernent la collecte de bouteilles en plastique par le biais de machines de déconsignation. Dans certains des pays « les plus recycleurs », les consommateurs ont l’habitude d’utiliser ces machines qui servent de relais pour les « systèmes de consigne ». Ces systèmes proposent une petite récompense aux consommateurs qui rapportent leurs bouteilles, habituellement un bon d’achat qui peut être utilisé dans le magasin même. La machine accepte les bouteilles, les pré-trie à l’aide de trieurs optiques en fonction du type de plastique, de la taille de la bouteille et des niveaux de contamination, contribuant au processus de recyclage en aval de la chaîne.
En Allemagne, leader européen et mondial du recyclage, les machines de déconsignation ont fait émerger une sorte de sport national, de nombreux adolescents et personnes plus âgées se livrant à la collecte de bouteilles en plastique pour de l’argent. Ceci s’est traduit par un taux de collecte de conteneurs en polyéthylène téréphtalate (PET) impressionnant de 95 % au niveau national[3]. Il va s’en dire que les fournisseurs de telles machines ont enregistré de très bons résultats, aussi bien en termes de rentabilité qu’au niveau de leur cours de bourse.
De plus en plus de pays sont en train d’introduire des systèmes de dépôt pour encourager les consommateurs à recycler. Cette tendance devrait se poursuivre, compte tenu des normes plus strictes adoptées en 2019 par la Directive européenne relative aux plastiques à usage unique[4]. La loi impose à tous les États membres un objectif de collecte de bouteilles de 90 % d’ici 2029, toutes les bouteilles en plastique devant contenir au moins 25 % de plastique recyclé (rPET) d’ici 2025. Les pays où les taux de recyclage des plastiques uniques ne sont pas encore assez élevés, tels que la France, le Portugal et l’Espagne devront inciter les entreprises « moteurs » à les aider pour répondre à temps aux exigences européennes. Tout comme pour l’écart lié au recyclage des déchets municipaux, cela va entraîner de nouvelles opportunités commerciales pour les fournisseurs. Opportunités que les gérants d’actifs vont permettre à leurs clients d’identifier, rendant la transition vers l’économie circulaire profitable pour l’environnement, les communautés et les investisseurs.
Monika Kumar, Fund Manager & Quentin Stevenart, ESG Analyst
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