Enjeux pour une analyse ESG des dettes souveraines - Interview avec Kroum Sourov Lead ESG Analyst – ESG Sovereign Research et Wim Van Hyfte, PhD Global Head of ESG Investments and Research.
Pourquoi votre nouveau modèle met-il l’accent sur le Capital Naturel ?
Il est généralement admis que le Capital Naturel est une ressource limitée, même si des désaccords persistent sur la marge qui peut exister au sein de ces limites. De nombreux changements environnementaux sont irréversibles, certains sont imprévisibles et de multiples points de bascule sont intervenus, sans avertissement. Le taux d’accélération des évènements de nature environnementale est alarmant.
Quelle est votre définition de la « soutenabilité forte » et de la « soutenabilité faible » ?
Le modèle d’analyse des Emetteurs Souverains, qui comporte quatre piliers, est couramment utilisé par des organisations comme l’OCDE, mais également par les investisseurs. En règle générale, ces modèles sont construits selon l’hypothèse que les quatre formes du capital puissent se substituées entre elles – ce que certains chercheurs universitaires appellent « Weak Sustainability », ou la « soutenabilité faible ».
Or nous estimons que le Capital Naturel ne peut être remplacé par aucune des trois autres formes de capital souverain – le Capital Humain, le Capital Social ou le Capital Economique. La définition même de la « soutenabilité forte » est que le Capital Naturel n’est pas substituable.
Comment ce modèle intègre-t-il concrètement les limites de notre Environnement ?
Comme beaucoup d’autres, notre précédent modèle d’analyse autorisait une substituabilité entre les quatre formes de capital et une utilisation illimitée du Capital Naturel. Le calcul des scores pays était une moyenne des quatre types de capital. Notre nouveau modèle restreint le Capital Naturel tout en renforçant son importance, à travers une évolution simple et directe de la méthodologie. Le calcul du score de soutenabilité de chaque pays est désormais le produit du Capital Naturel multiplié par la moyenne des scores obtenus sur les trois autres piliers du capital. Ainsi, par exemple, le mauvais score obtenu par un pays sur le Capital Naturel ne pourra plus être compensé par une surperformance dans le domaine du Capital Economique. Ceci a entraîné quelques changements dans les classements : par exemple, l’empreinte carbone élevée de l’Australie et sa dépendance aux ressources naturelles ont impacté son score Capital Naturel, et le pays a chuté dans le classement. En revanche, l’accent mis par le Vénézuela sur la neutralité carbone a propulsé le pays de la 41ème place selon l’ancienne méthodologie à la 17ème place sur la base de notre modèle « forte soutenabilité ».
Bien entendu, l’enrichissement du modèle ne s’est pas limité aux pondérations des différents piliers. La disponibilité des données progresse et nous avons renforcé nos bases de données et les capacités de notre modèle afin de capitaliser au maximum sur l’amélioration des informations. Nos 128 scores de soutenabilité des émetteurs souverains sont composés de plus de 470 facteurs sous-jacents, comme l’accès à l’électricité dans les zones rurales, la perte de couverture arborée (déforestation), la vulnérabilité des infrastructures et la gouvernance démocratique. Ces informations d’une grande richesse nous permettent de réaliser des analyses ou des prévisions complémentaires.
Comment gérez-vous les différences entre les pays développés et émergents ?
Notre seconde grande avancée a été de pondérer les facteurs et les enjeux en fonction de leur matérialité pour chaque économie. Par exemple, une série de données sur les véhicules électriques fait l’objet d’une pondération bien plus forte dans un pays comme la Norvège, tandis que la malnutrition pèse davantage au Ouganda. Notre solution pondérée de la matérialité offre deux grands avantages : la possibilité de classer les pays développés et émergents sur une même échelle, et la pertinence accrue des résultats du modèle, à la fois pour les décisions de gestion à court terme et pour les prévisions de tendance à long terme.
Comment l’analyse des émetteurs souverains peut-elle enrichir la recherche au-delà de l’identification des risques ?
Chaque pays présente des risques, mais offre également des opportunités. Les risques sont très variés et peuvent prendre de multiples formes ; il est donc simpliste de considérer l’analyse ESG des émetteurs souverains comme un outil de réduction des risques, notamment sur la dette émergente. Et pourtant, investir consiste à sélectionner et donner un prix aux risques que nous choisissons d’accepter afin de générer de la performance. De plus, nous sommes mieux armés pour juger de la capacité des pays à exploiter les nouvelles opportunités qui peuvent survenir. Nous revenons ainsi à la valeur ajoutée offerte par nos bases de données et les scores établis sur les facteurs, les émissions, les composantes et le capital, mis à disposition des analystes et des gérants de portefeuille de Candriam.
Est-il possible de mettre un prix à la « soutenabilité » des émetteurs souverains ?
Cette question n’a pas de prix ! Notre modèle ne valorise pas directement la soutenabilité des émetteurs souverains. Chaque score pays intègre des informations complémentaires. Nos équipes de gestion peuvent s’appuyer sur ces données pour mener un examen plus approfondi de certaines zones de risques ou d’opportunités. Le risque que certains facteurs extrafinanciers ne soient pas reflétés dans les notations de crédit s’inscrit pleinement dans l’histoire de l’investissement en dette émergente. Ces facteurs peuvent se dégrader ou s’améliorer et peuvent se refléter dans les cours des obligations bien avant qu’ils ne le soient dans les rapports économiques.
La soutenabilité est-elle un enjeu à court ou à long terme pour les émetteurs souverains ?
Notre philosophie est fondée sur notre nom, acronyme de Conviction et la Responsabilité – nous nous engageons à créer de la valeur pour les investisseurs, notamment pour que la finance puisse contribuer à assurer un monde meilleur. Notre souhait est de lier les enjeux de court terme avec les problématiques de long terme, grâce à notre concept d’analyse de soutenabilité optimisée : en appliquant nos pondérations de matérialité pour obtenir des résultats actuels et nos scores de « forte soutenabilité » pour anticiper les tendances sur le long terme.
Et la suite ?
Nous sommes toujours ouverts à toute nouvelle idée. Notre approche est expliquée plus en détails dans notre livre blanc : Émetteurs souverains : Capital naturel ou nature du capital ? Cette publication apporte également des éléments d’explication sur des phénomènes très médiatisés, comme la déforestation et l’Etat de droit aux Etats-Unis. Mais, notez dès à présent dans vos agendas l’actualisation de nos scores mi-2021, afin d’intégrer les données de 2020 et vous mettre ainsi à jour sur le positionnement des différents pays en matière de Changement Climatique…
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