Retrouvez ci-dessous le commentaire de Joyce STEVENSON, Analyste ESG chez Mandarine Gestion.
Si la pratique de rémunération variable indexée à des critères RSE est déjà une norme, son usage est en cours d’intégration.
Lier la rémunération des dirigeants aux facteurs de durabilité représente un moyen très efficace d’orienter une entreprise vers l'atteinte des objectifs de développement durable qu'elle s'est fixés et permet d’identifier les entreprises qui s’engagent réellement en faveur de plus de responsabilité sociétale et environnementale. Cependant son utilisation, la transparence, le choix des critères utilisés et le niveau d’atteinte des objectifs ESG ne sont pas encore maitrisés par toutes les sociétés.
En continuité avec la réglementation française (code Afep Medef1) dans le cadre de sa taxonomie sociale2 l'UE recommande des critères environnementaux et sociaux alignés sur les objectifs de l'entreprise dans les critères de rémunération des dirigeants et s’oriente vers une pondération minimale de l'ESG.
Selon une étude Kepler3, la plupart des entreprises européennes n’ont pas attendu la réglementation (soft law) pour lier RSE et rémunération variable (graph.1). En effet, une autre étude4 portant sur 365 émetteurs des principaux indices en Europe, révèle que 68 % des sociétés ont au moins une mesure ESG dans leurs plans d'intéressement.
Graphique 1 : L’utilisation des critères ESG dans la rémunération variable est déjà une norme
La rémunération variable doit inclure des indicateurs ESG précis, quantifiables, vérifiables et spécifiques à l’entreprise.
Une bonne pratique serait de lier les facteurs ESG à la structure des plans d'intéressement à court ou long terme et de laisser les entreprises sélectionner leurs propres objectifs de développement durable en ligne avec leur stratégie RSE.
Selon Proxinvest5, au sein du CAC 40, 55% des critères ESG sont dits quantitatifs, mais 21% de ces critères quantitatifs ne sont pas vérifiables (résultat non communiqué) par les actionnaires. A l’inverse, 43% des critères dits qualitatifs sont vérifiables.
Toutefois, si les critères de performance extra-financiers foisonnent (graph.2) il est essentiel de faire le tri en fonction des spécificités de l’entreprise. L’intégration simpliste de critères ESG à la rémunération variable peut s’avérer contre-productive et entraîner des conséquences indésirables : perte de motivation des dirigeants, perte de crédibilité et risque réputationnel comme le green ou social washing.
Graphique 2 : Critères ESG utilisés dans la rémunération variable
Selon l’ORSE (Observatoire de la Responsabilité Sociétale des Entreprises)6, 67% des entreprises du CAC 40 ont décidé d’intégrer un seul critère RSE dans l’élaboration de leur calcul de rémunération variable relevant d’un enjeu environnemental ou sociétal.
Certaines font le choix d’axer les critères extra-financiers sur le social (satisfaction des salariés, santé et sécurité, mixité) c’est le cas notamment de plus de 55% des entreprises du CAC 40, d’autres privilégient les enjeux liés au changement climatique, soit plus de 41% de l’indice.
Si aujourd’hui les critères ESG dans la rémunération variable concernent l’exécutif, la pratique devrait continuer de se développer et s’intégrer progressivement à l’ensemble de l’effectif.
En attendant, une meilleure utilisation des critères ESG est souhaitable.
2 Platform on Sustainable Finance, « Draft Report by Subgroup 4: Social Taxonomy », juillet 2021.
3 Kepler Corporate Governance, « Should a mandatory share of remuneration be linked to ESG performance? », novembre 2020.
4 Willis Towers Watson, « 2020 report on ESG metrics in top European companies ».
5 Proxinvest, « La rémunération des dirigeants des sociétés françaises », 2020. Proxinvest est une société d'analyse financière et de conseil aux investisseurs.
6 ORSE, « Critères RSE et rémunérations », juin 2017. L’Observatoire de la RSE est une organisation multi-parties prenantes qui accompagne les stratégies RSE dans les entreprises.
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