A l’issue du premier débat entre les deux candidats à l’élection présidentielle, les marchés ont rapidement réagi en intégrant dans leurs cours une victoire de Trump, anticipant le déploiement d’une politique semblable à celle de son premier mandat. Ce mouvement s’est accéléré après la tentative d'assassinat et les investisseurs s'attendent de plus en plus à une victoire de l’ancien président des Etats-Unis et à la prise de contrôle du Congrès par les Républicains. Jusqu'à récemment, peu de propositions politiques concrètes ont été formulées : les investisseurs ont donc jeté leur dévolu principalement sur les secteurs traditionnels de l’énergie, sur ceux bénéficiant le plus de la déréglementation et des avantages fiscaux tels que la finance, les cryptomonnaies ou les petites capitalisations, ainsi que sur les secteurs cycliques qui bénéficieraient d’une politique pro-croissance.
Bien qu'une victoire de Trump soit certainement le scénario privilégié, le réajustement des prix semble prématuré dans une certaine mesure.. Une grande partie des mouvements de marché est de nature spéculative et repose sur des hypothèses quelque peu naïves sur ce à quoi ressemblerait un second mandat de Trump. Malgré toute l'agitation médiatique autour des gagnants et des perdants de l'élection, historiquement, son effet sur les marchés est assez éphémère, le cycle des bénéfices déterminant finalement la performance du marché après le scrutin.
Quelles conséquences sur les marchés ?
Quelle que soit l’éventuelle pression politique de Trump, la Fed reste indépendante et s’appuie sur des données. Ces données, ainsi que les récentes déclarations de la banque centrale, montrent qu'une inflexion de la politique monétaire est imminente, avec le cycle d'assouplissement qui devrait commencer en septembre, la Fed adoptant probablement un rythme trimestriel mesuré de réductions de taux, à moins que de nouveaux éléments n'apparaissent sur le marché du travail ou la croissance économique internationale. Le commerce reste une variable importante et un domaine dans lequel Trump continue d'avoir de fortes convictions et la liberté d'agir de manière largement unilatérale sans l'approbation du Congrès. L'augmentation des tarifs douaniers, non seulement vis-à-vis de la Chine, mais aussi de l'Europe, risque de peser sur la croissance, tant au niveau national qu'international. Et les réductions d'impôts sont préoccupantes dans la mesure où les dispositifs du Tax Cuts et du Jobs Act pourraient être prolongés et que de nouvelles baisses d’impôts pourraient être annoncées. Il reste de nombreuses inconnues quant aux véritables gagnants et perdants, ainsi qu'à l'impact plus large du stimulus budgétaire sur la croissance.
Avec un tel consensus des marchés, il y a toujours le risque d’un mouvement de type « acheter la rumeur, vendre la nouvelle ». Et dans le même temps, il y également un risque que l’optimisme actuel se dissipe en fonction des changements dans les sondages ou des évolutions de la campagne. Par exemple, l'annonce récente du retrait de Biden de la course à la présidence et de son soutien à Kamala Harris pourrait modifier la dynamique de campagne et les performances du marché, qui semblaient tabler la semaine passée sur une victoire quasi certaine de Trump. Et étant donné la forte progression des collectes de fonds vers le camp démocrate dont disposera le camp Harris, il y a tout lieu de s’attendre à une lutte acharnée entre le « Trump Trade » dominant et le « Biden/Harris Trade », ce qui pourrait conduire à un nouveau scénario de blocage au Capitole.
Finalement, les impacts de la sphère politique sur les marchés sont généralement de courte durée. Il y a en effet des risques à la hausse et à la baisse à considérer quel que soit le résultat électoral, en particulier une victoire de Trump et une possible prise de contrôle du Congrès par les Républicains. Mais les entreprises ont démontré à maintes reprises leur dynamisme et leur capacité à s'adapter, ce qui suggère que les investisseurs devraient avoir confiance en la capacité des marchés à surmonter tout impact à court terme des péripéties électorales, car le contexte économique sous-jacent reste fondamentalement solide.
Par Garrett Melson, Stratégiste marchés chez Natixis Investment Managers Solutions, Boston, Etats-Unis
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