La marche était haute. Mais Nvidia n’a pas déçu. C’est une bonne nouvelle car l’assise de l’entreprise est telle que le moindre mouvement de son action entraîne des répercussions jusqu’au marché du crédit à haut rendement en Europe. L’entreprise de tous les records – le 31 juillet dernier sa capitalisation boursière a augmenté sur la journée de 329 milliards de dollars – a plus que doublé son chiffre d’affaires au deuxième trimestre.
Les prochains trimestres s’annoncent également positifs. Ses principaux clients (cloud providers et Meta) craignent de ne pas investir suffisamment dans l’IA, comme ils l’ont rappelé lors des earnings call ayant eu lieu cet été. Ils vont continuer d’investir massivement, en particulier dans les infrastructures IA avec des besoins en puissance de calcul pour entraîner les nouveaux modèles qui vont exploser. C’est une bonne nouvelle pour Nvidia. En outre, avec le lancement de la puce Blackwell, l’entreprise conforte son assise de marché. Sa petite dernière possède une puissance de calcul 1000 supérieures aux puces fabriquées il y a huit ans de cela. Elle est également moins énergivore. Sa consommation pour entraîner les IA est de seulement 4 mégawatts - soit l’équivalent de la consommation annuelle moyenne d’un foyer français - contre 15 mégawatts pour ChatGPT.
Vous aurez aussi peut-être remarqué une anomalie dans les résultats financiers de Nvidia: Singapour est l’un des principaux points de production et de vente du groupe. En fait, le géant de l’IA est devenu spécialiste de l’optimisation fiscale. En délocalisant sa production dans la cité- État grâce à d’importantes incitations fiscales de la part du gouvernement local, Nvidia a drastiquement réduit son taux d’imposition effectif aux États-Unis. Le groupe américain déclare désormais réaliser plus ou moins la totalité de ses bénéfices à l’étranger. Résultat: entre 2016 et 2022, le montant de son impôt sur les sociétés est nul aux États-Unis.
Selon nous, le potentiel boursier de Nvidia est intact. La correction estivale du Nasdaq, qui reflétait en partie des interrogations sur la réalité de l’IA, a permis de faire baisser les niveaux de valorisation. C’était nécessaire. Ils sont désormais à des niveaux plus attractifs et loin de ceux atteints pendant la bulle technologique de l’Internet à laquelle les oiseaux de mauvais augure comparent souvent la période actuelle. Pour la première fois depuis la fin des années 1990, aucune entreprise technologique n’a un ratio cours sur bénéfices à douze mois qui soit supérieur à 40. Celui de Meta est à 21, celui d’Apple à 24,6, celui de Nvidia à 33,3 et celui d’Amazon à 39,7.
Les marchés fonctionnent par cycle, avec souvent les mêmes interrogations qui surviennent régulièrement. Il y aura donc d’autres coups de mou concernant la révolution de l’IA, d’autres questionnements pour savoir si c’est une bulle ou pas. C’est normal. En revanche, ces phases pourraient être plus brutales en bourse, à l’image de ce qui s’est produit au début du mois d’août, avec une plus grande volatilité des cours. C’est la conséquence directe d’une liquidité anormalement basse en bourse, même pour la saison. Par exemple, la liquidité sur les contrats à terme du S&P500 est à son point bas de 2022 – au moment de la grande débâcle des actions technologiques à la suite du resserrement quantitatif opéré par la Fed. Si ce phénomène perdure, il va falloir s’habituer à une volatilité durablement plus importante et à des spreads plus élevés.
Par Christopher Dembik, conseiller en stratégie d’investissement chez Pictet AM
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