Citigate Dewe Rogerson x Grayling publie les résultats de sa douzième étude annuelle sur les relations investisseurs. Conduite courant juin, l’étude vise à mettre en lumière les récentes tendances en termes de pratiques de communication financière et relations investisseurs grâce à la contribution de près de quatre cents sociétés cotées à travers le monde.
Cette année, l’étude a plus particulièrement cherché à cerner l’impact de la pandémie de COVID-19 sur les pratiques de communication et les relations entre émetteurs et investisseurs, ainsi que l’importance grandissante de la communication extra-financière/ESG.
Principaux enseignements
- Prudence et transparence accrues de la part des équipes de relations investisseurs dans un contexte très particulier de pandémie mondiale
- Liens entre émetteurs et investisseurs renforcés malgré des modes d’interaction bouleversés
- Insouciance face à la menace activiste qui pourrait éventuellement resurgir en sortie de crise ?
- La qualité de la communication extra-financière au cœur des priorités des équipes de relations investisseurs du fait d’un besoin grandissant d’information de la part des investisseurs
- La difficulté du « reporting » ESG : des messages encore peu intégrés à la communication financière classique d’où un argumentaire ESG souvent peu développé et, donc, encore peu marketé auprès des investisseurs
- La France se singularise très favorablement en matière de pratiques de communication ESG
Philippe Ronceau, Director chez Citigate Dewe Rogerson x Grayling France, commente :
« Les impacts du COVID-19 ressortent très clairement dans les résultats de notre étude annuelle. Les émetteurs, d’une prudence accrue, se sont néanmoins mobilisés pour encore plus de transparence dans leur communication financière. Les modes d’interaction entre émetteurs et investisseurs ont été bouleversés mais il est rassurant de constater que leurs liens se trouvent renforcés.
On observe très nettement que les émetteurs se mobilisent aussi pour répondre au besoin grandissant d’information extra-financière de la part des investisseurs. En revanche, on constate aussi que l’intégration des considérations ESG reste un défi à relever à l’échelle mondiale. L’argumentaire ESG, de fait encore peu développé, est donc aussi peu proactivement marketé auprès des investisseurs. Les émetteurs français se distinguent positivement à de nombreux égards : ils se révèlent plus mobilisés ainsi que plus enclins à intégrer et essayer de faire valoir leurs messages clés ESG. »
Principales conclusions de l’étude à l’échelle mondiale et en comparaison avec la France
Prudence et transparence
Etant donné l’ampleur de la crise sanitaire et le choc économique qui en a résulté, 43% des équipes des relations investisseurs interrogées à travers le monde ont suspendu leur « guidance » pour 2020 (62% en France). Cette prudence se manifeste aussi par le fait que seuls 21% des répondants ont proposé aux investisseurs d’interagir davantage avec leurs équipes dirigeantes (14% en France).
Cette attitude prudente s’accompagne malgré tout d’une intensification des prises de contact proactives avec des investisseurs pour 43% des répondants (41% en France) ainsi que d’importants efforts de transparence. En effet, 40% des sociétés cotées interrogées ont fourni une information financière plus détaillée qu’à l’accoutumée (45% en France) et 37% ont augmenté leur fréquence de communication (41% en France).
Modes d’interaction bouleversés
La pandémie a considérablement bouleversé les rapports humains et, par conséquent, la manière dont les entreprises cotées et les investisseurs interagissent. Au-delà des perturbations brutales liées à la crise sanitaire, les équipes de relations investisseurs pensent que le virtuel tiendra un rôle plus prépondérant à l’avenir. Ainsi, 89% des répondants (86% en France) envisagent davantage de réunions investisseurs virtuelles ad hoc tout au long de l’année (par opposition aux programmes de « roadshows » physiques traditionnels). Par ailleurs, 48% (38% en France) anticipent aussi plus d’événements virtuels, comme les journées investisseurs.
Cependant, une nette majorité de répondants (62%) s’attendent à ce que la plupart des réunions investisseurs soient physiques post COVID-19 (65% en France). Ceci démontre l’importance du contact humain dans les pratiques de relations investisseurs et nous laisse penser que l’adoption de nouvelles technologies traduit principalement un besoin impératif de continuer à échanger malgré les contraintes liées aux mesures sanitaires.
Enfin, on peut envisager une refonte plus profonde de la tenue des assemblées générales d’actionnaires, traditionnellement des rendez-vous purement présentiels, bien qu’en pratique la plupart des votes se fassent par procuration. En effet, une grande majorité des entreprises interrogées estiment que leurs assemblées générales seront, post COVID-19, soit totalement virtuelles (30% à l’échelle mondiale et 41% en France), soit hybrides (46% monde et 30% France).
Liens renforcés
Malgré ces bouleversements quant à la forme, les interactions ne semblent pas être négativement impactées sur le fond. En effet, 66% des répondants ne prévoient aucun changement quant à la cadence des journées investisseurs ou autres événements assimilés au cours des 12 prochains mois (89% en France). De plus, 56% n’anticipent pas de changement concernant la cadence de leur participation à des conférences de « brokers » (57% en France). Enfin, il y a plus de répondants qui souhaitent augmenter la cadence de leurs « roadshows » investisseurs (37%) que de la diminuer (19%). En France, ces deux proportions sont peu ou prou égales (24% et 21% respectivement).
On observe également un renforcement des liens entre conseil d’administration et actionnaires. Cette année encore plus que les années précédentes, les conseils d’administration ont été appelés à s’engager sur des questions cruciales, telles que le versement de dividendes et la rémunération des dirigeants, dans un contexte d’appel à la modération de la part des pouvoirs publics. Ainsi, 37% de répondants caractérisent comme forte la relation entre leur conseil d’administration et leurs 10 principaux actionnaires, contre 31% il y a un an. Les progrès sont particulièrement nets en Europe, où 51 % des répondants ont qualifié leur relation de forte (57% en France), contre 35 % en 2019 (50% en France sur un échantillon plus petit).
En revanche, malgré l’étendue de la crise et la plus grande implication des conseils d’administration, on peut s’étonner de la très faible progression du pourcentage de professionnels de relations investisseurs invités à assister aux réunions du conseil d’administration : 66% cette année (seulement 54% en France) contre 63% il y a un an (50% en France sur un échantillon plus petit).
Insouciance face à la menace activiste ?
Enfin, malgré la volatilité des cours de Bourse et le contrôle accru des investisseurs sur la manière dont les entreprises s’adaptent à la crise, la plupart des répondants ne pensent pas être exposées à un risque plus élevé d’activisme actionnarial. Seuls 23% (21% en France) estiment que la menace activiste s’est accentuée par rapport à l’année dernière. Ces résultats sont globalement conformes à ceux de notre étude de 2019, où 22% des participants avaient répondu que la menace ne leur semblait pas plus grande d’une année à l’autre. Cela pourrait peut-être refléter une certaine forme d’insouciance : en sortie de crise, des séquelles pourraient vraisemblablement se traduire par de nouvelles opportunités pour les investisseurs activistes.
Mobilisation face aux besoins grandissants d’information ESG
L’amélioration de la qualité de l’information extra-financière représente la deuxième priorité des équipes de relations investisseurs à l’horizon des 12 prochains mois (pour 64% des répondants contre seulement 47% il y a un an), juste derrière “faire comprendre la stratégie de l’entreprise” (67%). En France, il s’agit même de la priorité numéro 1 (76%), nettement devant celle relative aux efforts pédagogiques concernant la stratégie de l‘entreprise (62%).
Cette forte mobilisation des équipes de relations investisseurs répond à un besoin accru d’information extra-financière de la part des investisseurs. En effet, 79% des répondants affirment avoir constaté une augmentation des questions liées à l'ESG (proportion identique en France). Cette augmentation est même qualifiée de significative par 27 % d'entre eux (29% en France).
Par ailleurs, il ressort de l’étude que la pandémie de COVID-19 a eu un effet amplificateur puisque 72% des répondants (82% en France) estiment que la crise sanitaire a intensifié l’attention portée aux considérations ESG.
Enfin, les conseils d’administration se mobilisent aussi pour répondre au besoin des investisseurs même si des progrès restent sans doute à faire. En effet, 43% des répondants affirment qu’au moins un de leurs administrateurs a de l’expérience dans la gestion des questions ESG (48% en France). En revanche, seulement 10% disent que l’ensemble du conseil est qualifié (10% aussi en France). Enfin, un comité du développement durable n’a été mis en place que dans un tiers des cas, soit 37% à l’échelle mondiale, mais près d’un sur deux (48%) en France.
Les défis du « reporting » ESG
A l’échelle mondiale, 77% des entreprises interrogées publient un rapport sur le développement durable, généralement plutôt séparé (42%) qu’intégré (35%). On note de grandes disparités géographiques. Ainsi, 46% des entreprises nord-américaines ne produisent aucun rapport. En France, 81% en publient un, très majoritairement intégré (70%). Le « reporting » ESG représente un défi à deux niveaux.
Premièrement, concernant le cadre, 31% des répondants ne se conforment à aucun cadre de « reporting » communément utilisé. On retrouve les mêmes disparités géographiques (qu’énoncées précédemment) puisque 54% des entreprises nord-américaines ne se réfèrent à aucun cadre contre seulement 24% en France. Les deux cadres les plus utilisés à l’échelle mondiale sont les Global Reporting Initiative (GRI) Standards (pour 39% des répondants) et les United Nations Sustainable Development Goals (pour 33%), sachant que plusieurs cadres peuvent être utilisés au sein d’une même entreprise. En France, le cadre des Nation Unies est bien plus populaire (41%) que celui du GRI (17%).
Deuxièmement, concernant l’ampleur, 15% des répondants disent n’intégrer aucune considération ESG dans leur communication financière (7% en France) et la quasi-majorité (47% mondialement et 45% en France) ne le font qu’à travers leur site internet ou via leur rapport sur le développement durable (intégré ou séparé). La difficulté est donc l’intégration même de l’ESG au sein de la communication financière traditionnelle, pour plus de 50% des répondants ! En effet, seulement 35% font référence aux considérations ESG dans leurs publications de résultats financiers (45% en France). Enfin, à peine 12% des répondants fournissent un flux régulier d’information ESG (qui émane donc directement des équipes de relations investisseurs), avec les mêmes disparités géographiques précédemment constatées : 6% en Amérique du Nord contre 31% en France.
De plus, les entreprises interrogées restent encore peu nombreuses à faire valoir leur argumentaire ESG auprès des investisseurs. En effet, seuls 19% des répondants à l’échelle mondiale disent cibler de manière proactive des investisseurs ESG (33% en France contre 6% en Amérique du Nord). De même, une grande majorité (76%) n’organisent pas d’événements investisseurs dédiés à l’ESG (46% en France et 94% en Amérique du Nord).
Méthodologie
Cette étude a été réalisée en juin 2020 auprès de 377 directeurs⋅rices de relations investisseurs représentant des sociétés cotées issues de 55 pays et qui totalisent une capitalisation boursière supérieure à 3,200 milliards de dollars. L’échantillon français se compose de 29 entreprises de toute taille, de quelques dizaines de millions à environ deux cents milliards d’euros de capitalisation.
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