Vous sous-évaluez systématiquement vos transactions ? Et vous consentez des avantages occultes au profit de votre cessionnaire ? Cette cession pourrait se voir requalifiée en donation indirecte… avec toutes les conséquences qui vont de pair (droits de donation, rapport,…).
La décision de la 1ère chambre civile du 21 octobre n’est pas nouvelle mais elle permet de faire une petite piqure de rappel aux contribuables qui souhaiteraient donner sans réellement le dire. En l’espèce, il s’agissait d’un couple qui avait cédé, pour un prix sous-évalué, des terres agricoles à l’une de ses filles. La sœur délaissée décida de contester cette vente lors du décès du père.
Elle obtenu gain de cause, et ceci grâce à deux éléments :
- La sous-évaluation systématique des biens cédés
- Le consentement d’avantages occultes
Ces deux éléments ont permis aux juges du fonds de souverainement caractériser l’intention libérale ou, comme le souligne la Cour « la volonté manifeste des époux de gratifier leur fille », requalifiant ainsi cette cession en donation indirecte.
La 1ère chambre civile de la Cour de cassation ne s’arrête pas là puisque l’une des conséquences de la qualification d’une donation étant le rapport de cette dernière à la succession du défunt père, elle statua également sur la détermination de la somme à rapporter dans une telle hypothèse.
En l’espèce, le terrain litigieux était grevé d’un bail au profit de la fille bénéficiaire de la cession. Par conséquent, lors de cette cession le locataire devint également propriétaire ; cette confusion entraina ainsi l’extinction du bail.
Dans cette situation, c’est sans surprise que la 1ère chambre civile estima que la valorisation du terrain à rapporter à la succession ne devait pas tenir compte de ce bail et donc porter sur le terrain libre de bail : « la réunion sur la tête de celui-ci des qualités incompatibles de propriétaire et de fermier, avait cessé d'être grevé du bail dont il était auparavant l'objet. »
En somme, que ce soit pour de bonnes ou de mauvaises raisons, l’intention des parents était de gratifier davantage l’une de leur fille. Une situation qui n’est pas nouvelle mais qui est réglée par le principe fondamental de la réserve héréditaire, présent dans le code civil depuis 1804, rendant difficile une inégalité successorale (importante) entre les enfants.
Le Règlement Européen successions du 4 juillet 2012, en vigueur depuis le 17 août 2015, a aujourd’hui réintroduit le débat en posant la question de la qualification d’ordre public internationale de notre réserve héréditaire française… En attendant une réponse claire, il n’est toujours pas possible de « déshériter » ses enfants, quel qu’en soient les raisons…
SL/FL