Par Matthieu Bailly, directeur général délégué et gérant obligataire
La semaine que le consensus attendait depuis 18 mois est enfin arrivée ! Alors non, il ne s’agissait pas de fêter Halloween, ni de la finale de la Coupe du Monde de Rugby… Mais bien de la pause de la FED et de la BCE ! Et qu’elles furent bienvenues et réparatrices après les soubresauts des dernières semaines sur les marchés qui commençaient à secouer les actifs risqués de manière assez semblable à ce qu’on avait pu observer fin 2018, ne laissant rien augurer de bon pour les deux derniers mois de l’année…
Et comble de bonheur pour les marchés, cette pause commune s’est accompagnée de statistiques économiques marquant un ralentissement net de l’inflation et de la croissance, ralentissement qu’ils attendaient de pied ferme depuis bientôt deux ans sans en voir la couleur. Car encore aujourd’hui, le fameux mantra « bad new is good news » fonctionne à plein dans certaines phases de marché durant lesquelles les investisseurs peinent à trouver des justifications à certaines valorisations, des catalyseurs à leurs portefeuilles ou des réponses à leurs incertitudes et espèrent que la banque centrale viendra à leur secours par une politique la plus accommodante possible. Et c’est ici que nous en sommes aujourd’hui pour l’essentiel des marchés financiers :
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Les investisseurs obligataires hésitent à se positionner sur les actifs les plus rémunérateurs, en particulier le High Yield par crainte d’une récession, mais trouvent les obligations les mieux notées relativement volatiles et pas toujours assez rémunératrices par rapport aux produits court terme.
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Les investisseurs actions ne souhaitent pas réviser leurs modèles à l’aune de la hausse des taux par peur d’un dégradement significatif des valorisations et ne trouvant pas dans les publications, des chiffres, des perspectives et les arguments permettant de contrer des multiples un peu trop élevés par une croissance forte.
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Les investisseurs en actifs privés – dette, private equity, immobilier – sont quasi tétanisés par un marché au bord de la rupture.
Alors évidemment, la moindre pause des banques centrales laisse espérer à tout le monde le fameux point pivot, avec une nouvelle baisse des taux qui permettrait à tout le marché de revenir sur ses formules mathématiques si confortables de la décennie 2010, portant aux nues à peu près tous les actifs, si douteux soient-ils.
Si nous profitons nous aussi des regains de valorisation au sein de nos portefeuilles et d’une plus grande sérénité après les à-coups de volatilité et les phases d’illiquidité des semaines passées, nous proposerons ici trois mises en garde par rapport à ces croyances relatives aux banques centrales et aux valorisations :
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Une pause n’est pas un pivot ou un revirement : la FED comme la BCE ont continué de tenir un discours relativement conservateur et restrictif sur leur politique monétaire, affirmant que l’économie reste solide malgré l’inflation et les taux les plus élevés de la décennie. La pause était prévue de longue date et n’est pas issue d’un imprévu sur des statistiques économiques ou d’un retournement de confiance des consommateurs ou des producteurs. Mais n’oublions pas qu’une banque centrale s’inscrit dans la durée et que sa politique nécessite plusieurs moi à plusieurs années avant de se diffuser dans l’économie réelle ; ainsi le fameux quantitative easing a-t-il mis 3 à 5 ans aux USA pour infuser totalement, presqu’une décennie en Eurozone (sa fin n’ayant été actée que par la crise du CoViD puis le conflit ukrainien), et presque deux décennies au Japon… Alors, après une année de hausse de taux dans une phase de lutte urgente contre une inflation forte, il est logique que la FED prenne quelques mois pour observer les effets de sa politique. Cela ne veut nullement dire qu’elle stoppera définitivement sa hausse de taux, ni (moins encore) qu’elle les baissera d’ici quelques semaines… Cette pause, que devrait observer également la BCE doit donc être mise à profit pour atténuer l’effet de certaines révisions de valorisation ou réaliser quelques arbitrages. Elle permettra un regain pas toujours justifié sur certains actifs mais aucunement pour persister sur des rendements d’actifs trop bas en espérant que les taux directeurs rebaissent rapidement et violemment.
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