James Syme, Paul Wimborne et Ada Chan, gérants du fonds Global Emerging Markets Opportunities Fund chez JO Hambro, soulignent dans cette note l'impact de ces élections sur l'équilibre géopolitique et les marchés financiers.
En 2024, le calendrier international est marqué par une série d'élections sans précédent dans l'histoire moderne. Les marchés émergents sont au cœur de cette dynamique, avec des élections parlementaires ou présidentielles clés, à Taïwan, en Inde, en Indonésie, en Afrique du Sud et au Mexique. – représentant 40 % de l'indice MSCI des Marchés Émergents et touchant près de 1,9 milliard de personnes. Par ailleurs, d'autres scrutins pourraient influer de manière décisive sur le paysage macroéconomique global, un enjeu de taille pour les marchés d'actions émergents. Les sanctions vis-à-vis de la Chine, les répercussions du conflit russo-ukrainien sur les prix des matières premières et le commerce, ainsi que les conflits qui se chevauchent au Moyen-Orient et dans la région de la mer Rouge, ont tous un impact direct sur les marchés financiers. Il y a énormément à écrire sur chacune de ces élections ; dans cet article, nous nous concentrerons sur une caractéristique particulière du calendrier politique de cette année.
Une tendance croissante qui affecte tous les investisseurs, y compris ceux qui investissent dans les marchés émergents, est la détérioration continue de l'environnement géopolitique mondial. Il est difficile de dater précisément le début de cette tendance, mais l'Afrique subsaharienne, le Moyen-Orient et les pays de l'ex-Union soviétique ont été le théâtre de coups d'État, d'instabilité et d'actes de violence ces dernières années, tandis que nous assistons avec d’autres relations internationales à un basculement de la coopération pacifiste à une confrontation antagoniste. Cette année, les élections prévues dans certaines de ces zones à conflits pourraient potentiellement aggraver ou améliorer la situation.
En ce début de l'année, Taïwan est sous les projecteurs avec ses élections présidentielles et législatives. Tsai Ing-wen, l'actuelle Présidente issue du Parti Démocratique Progressiste (DPP), ne pouvant pas se présenter pour un troisième mandat, c'est donc le Vice-Président Lai Ching-te a été nommé candidat du DPP ayant une légère avance dans les sondages. Le DPP, connu pour ses positions en faveur de l'indépendance, pourrait, si Lai l'emporte, susciter une vive réaction de la part de Pékin. Sur les marchés financiers, nous avons adopté une position prudente vis-à-vis de Taïwan et de la Chine, une décision influencée par plusieurs facteurs, parmi lesquels la géopolitique n'est pas des moindres.
L'élection présidentielle en Russie arrive en mars. Le scrutin précédent, qui s'est déroulé en 2018, est largement perçu comme ayant manqué de liberté et d'équité ; Vladimir Poutine, le président actuel, avait alors remporté 77,5 % des suffrages, et depuis, le climat politique en Russie s'est nettement durci La situation économique pèse lourd : beaucoup de citoyens russes ont vu leurs espoirs s'évanouir et le pays aurait enregistré plus de 100 000 pertes dans le conflit ukrainien. Bien qu'une réélection de Poutine semble probable, on ne peut écarter le risque de manifestations et de répressions susceptibles de faire évoluer la politique intérieure russe.
Dans la première partie de l'année, le Venezuela s'apprête à tenir des élections présidentielles. À l'instar de la Russie, le processus démocratique y est fortement remis en question. Maria Corina Machado, principale candidate de l'opposition, a été exclue de la vie politique en juin 2023, ce qui laisse présager une réélection probable de la coalition au pouvoir, très certainement avec Nicolás Maduro en tête. À l'approche des élections, le Venezuela a affirmé revendiquer la quasi-totalité du territoire guyanais, laissant entendre qu'une intervention militaire, avec le soutien de l'Iran, de la Russie et de la Chine, pourrait être envisagée. Cela aggraverait considérablement les tensions géopolitiques mondiales, ouvrant la porte à une multitude de scénarios possibles
En milieu d’année, cinq nouveaux membres non permanents seront élus au Conseil de sécurité de l'ONU. Même si les cinq membres permanents, dotés du droit de veto, détiennent l'essentiel du pouvoir, c'est au sein de cette instance que se jouent les premières étapes des processus de résolution de conflits. Parmi les candidats qui ont des chances d'être élus, on retrouve le Pakistan et la Somalie. Le Pakistan, allié de la Chine et de l'Iran et en tension avec l'Inde, et la Somalie, en conflit avec l'Éthiopie, sont des acteurs qui pourraient aggraver davantage les tensions géopolitiques dans la région de la mer Rouge.
Israël n'a pas d'élections prévues, mais le pays a connu une période de turbulences politiques avec cinq élections entre avril 2019 et novembre 2022 dans l'espoir de former un gouvernement stable. Cependant, le gouvernement d'urgence mis en place suite aux attaques d'octobre 2023 pourrait se retrouver fragilisé avant la fin de 2024. Des élections anticipées pourraient aboutir à plusieurs scénarios : de la négociation d'une solution politique à la crise actuelle à un basculement vers un gouvernement plus nationaliste, ce qui risquerait d'exacerber les tensions avec les Palestiniens et les pays voisins d'Israël.
La fin d'année sera marquée par l'élection présidentielle américaine. L'impact de cette élection s'étendra bien au-delà des politiques économiques et commerciales du vainqueur, qui sont cruciales pour les marchés émergents, car elle influencera également les enjeux géopolitiques mondiaux. La relation entre la Chine et Taïwan, le conflit russo-ukrainien, la guerre à Gaza et les conflits et tensions connexes (y compris la navigation en mer Rouge) et tout ce qui se passe à la frontière entre le Venezuela et le Guyana, seront tous influencés par les décisions prises aux États-Unis lors du scrutin du premier mardi de novembre 2024.
Alors que nous abordons 2024, la tension géopolitique mondiale est palpable. Les six élections à venir pourraient bien remodeler notre monde, pour le meilleur comme pour le pire. Il est essentiel pour les investisseurs de rester vigilants, de suivre ces événements avec attention et de s'adapter aux changements qu'ils pourraient engendrer.
A propos de J O Hambro Capital Management Limited
JO Hambro Capital Management Limited (JOHCM) est une société de gestion active d'actifs dont le siège est au Royaume-Uni et dont la culture est axée sur la performance des investissements. Elle gère 25.3 milliards d'euros d'actifs (au 30 juin 2023) à travers des actions britanniques, européennes, asiatiques, mondiales/internationales et de marchés émergents et des stratégies multi-actifs. JOHCM limite la capacité des stratégies d'investissement afin de promouvoir une performance de portefeuille leader sur le marché.