“I can’t live with or without you”, chantait U2 dans les années 80. Aujourd’hui, on peut se demander si certains investisseurs, lorsqu’ils s’interrogent sur la durée potentielle de la hausse actuelle des marchés, n’éprouvent pas une ambivalence de sentiments similaire estime César Pérez Ruiz, responsable des investissements chez Pictet.
De fait, l’indice S&P 500 a atteint de nouveaux records la semaine dernière, malgré une progression toujours timide des bénéfices et l’absence d’avancée décisive dans les négociations commerciales entre la Chine et les Etats-Unis (sachant qu’un accord serait évidemment porteur pour les marchés).
Et bien qu’elles paraissent chères à première vue, les actions ne sont pas si onéreuses que cela, si l’on se souvient que les taux d’intérêt qui prévalaient il y a un an étaient nettement moins bas qu’aujourd’hui.
Face aux craintes de certains investisseurs de passer à côté d’une hausse prolongée, anticiper une possible inflexion de tendance reste difficile. La décision des Etats-Unis d’imposer ou non de nouveaux droits de douane sur les importations chinoises le 15 décembre prochain sera déterminante à court terme. Un report dans l’attente d’engagements plus clairs de la part de Pékin pourrait suffire à rassurer les marchés. Mais c’est un accord annulant des taxes douanières imposées précédemment qui représenterait le véritable cadeau de fin d’année.
Concernant la Chine, les investisseurs restent à l’affut de nouvelles positives, a fortiori dans le sillage des statistiques publiées la semaine dernière, qui attestent un nouveau ralentissement de la dynamique économique en octobre. Si une analyse approfondie des projets immobiliers, des ventes automobiles ou des ventes en ligne, par exemple, laisse penser que la décélération conjoncturelle touche à sa fin, la dernière série de données publiées repousse nos anticipations de rebond à court terme pour la Chine à début 2020.
L’Amérique latine émet elle aussi des signaux contrastés. L’actualité en Bolivie, en Argentine et même au Chili vient d’ailleurs nous rappeler que la région met souvent les nerfs des investisseurs à rude épreuve.
Après la libération de Lula da Silva, qui exacerbe des divisions déjà profondes dans le pays, le Brésil pourrait s’ajouter aux foyers d’inquiétudes existants. Dès lors que l’importante réforme des retraites se poursuit, nous restons plutôt positifs à l’égard du Brésil pour le moment, mais, à l’évidence, la sélectivité s’impose en ce qui concerne les marchés émergents.
L’Europe est elle aussi confrontée à des turbulences sur la scène politique. En Espagne, la formation d’un gouvernement minoritaire de gauche dépendant des partis régionaux suscite de nombreuses questions pour l’avenir. Pour l’heure, nous adoptons donc un positionnement globalement négatif à l’égard des obligations de la périphérie européenne.