Les perspectives des Marchés de Fundesys et recommandations générales.
A. Pour comprendre et relativiser les performances de 2019 il nous semble essentiel de les rapprocher de celles de 2018 et de raisonner en cumulé : les actions progressent en 2019 de 20% (Marchés émergents globaux) à 41% (Nasdaq) en passant par les indices européens à 28% en moyenne et le S&P 500 à 31% ; ils rattrapent les reculs de 2018 avec un excédent de 15 pts environ en Europe et de 20 pts aux Etats-Unis. Sur les deux années cumulées la progression est de 16% sur le S&P 500, 10% sur le CAC 40 et de 5% sur l’ES 50 ; dans le même temps les résultats des sociétés ont progressé en cumulé sur les deux exercices de 24% aux Etats-Unis, 7% en France et 2% sur la ZE, avec des reculs des taux longs de 80 bp (2.70 à 1.90%) et 90 bp en France (1 à 0.05%) et en Allemagne (0.60 à -0.30%). S’il y a eu des excès dans les mouvements baissiers / haussiers sur cette période au final la valorisation des grands indices boursiers par le P/E est très proche de celle d’il y a deux ans (le Nasdaq mis à part) : MSCI World : 16.3X, S&P 500 : 18,5X, CAC : 14.8, ZE : 14X, avec des taux longs nettement plus bas : les valorisations sont élevées en absolu mais par rapport à l’historique récent et aux taux d’intérêt, on ne peut pas dire que l’on soit arrivé à l’issue de ces deux années à une situation d’exubérance, sauf à considérer que les marchés actions étaient déjà surévalués au 31 décembre 2017, ce que l’on ne disait pas à l’époque.
B. La Fed a largement participé à ce rétablissement par lequel on peut constater une nouvelle fois son influence décisive sur les investisseurs dans les moments de stress ; elle y a mis les moyens, à l’ « américaine » pourrait-on dire : en tournant le dos dès janvier à la politique de normalisation monétaire commencée un an plus tôt puis en décidant trois baisses de taux au 2è semestre pour finir l’année sur une ouverture encore très accommodante pour 2020 (« et au-delà si nécessaire »); elle a ainsi offert aux entreprises et aux investisseurs l’assurance dont ils avaient besoin pour maintenir la confiance à flot. Dans un environnement où les autres paramètres de marché (ralentissement économique, stagnation des bénéfices, risques politiques divers) ont été des facteurs baissiers sur l’ensemble de l’année, ou a minima de volatilité (la guerre commerciale qui a heureusement évolué vers la trêve que l’on connaît) son action a donc été décisive et c’est ce qu’il faut retenir selon nous de l’année écoulée.
C. Que dit le consensus ? Dans ces conditions de politique monétaire très accommodante aux Etats-Unis donc, mais globalement partout dans le monde, de politiques budgétaires également expansionnistes sur toutes les zones à l’exception de l’Allemagne et des Pays-Bas (3% du PIB mondial) et de réduction du risque politique liée à la trêve commerciale, le scenario d’une reprise modérée de l’activité économique en 2020 est logique et c’est clairement celui du consensus : notre lecture des scenarios macro/marchés (résumés) de 30 brokers et asset managers internationaux de premier plan conduit, avec un taux d’adhésion de 80% environ, aux prévisions suivantes :
a. Reprise modérée de la croissance mondiale, soit 0.15/0.25% de plus que les 2.8% attendus pour 2019.
b. Les risques politiques reculent sur l’axe Chine/USA mais l’incertitude autour de l’élection américaine va commencer à monter et les « anciens » risques restent entiers en Europe-cœur (fractures au sein de chaque grand pays et absence de vue commune sur l’intégration européenne), en Europe Orientale, au Moyen-Orient (l’actualité récente le confirme une nouvelle fois) mais aussi en Chine (HK, relations avec ses voisins).
c. Pas de reprise de l’inflation, c’est le point le plus unanime (95%)
d. Les taux longs vont rester proches des bas niveaux actuels …
e. ...ce qui favorise globalement les actifs risqués mais chacun est lucide sur un potentiel de performance limité comparé à 2019 ; rappelons que le consensus attend une progression des bénéfices de 10% en moyenne sur les grandes zones, soit 10% pour l’ensemble du MSCI World ; deux établissements donnent une prévision pour le S&P 500 au 31/12/2020 : 3400 et 3450, dans les deux cas grâce à une croissance des résultats de 5-7%.
f. En terme de stratégie actions, là aussi une nette majorité (moins quantifiable néanmoins) privilégie les valeurs qualité / visibilité / croissance, avec les arguments les plus cités suivants : fin de cycle, risques macro et politiques élevés, dégradation structurelle des fondamentaux des sociétés par la hausse de leur endettement, les hausses des coûts salariaux > inflation, la prise en compte croissante des critères ESG dans la sélection des sociétés, … ; d’où la nécessité de pratiquer la résilience, terme qui est revenu plusieurs fois.
g. Sur le plan géographique pas de vision explicite mais entre les lignes on comprend que la plupart surpondèrent les actions américaines (point probablement biaisé par le fait que la majorité des entités du panel sont américaines) ; en tout état de cause pas de vision franchement positive en faveur des actions européennes.
h. Quelques-uns recommandent une diversification vers les fonds value et les small caps européennes.
i. Sur les obligations deux thèmes reviennent : les corporate HY OCDE (moins d’émissions mais appétit d’achat toujours élevé) et les EM (pour leur rendement).
Les avis divergents de ce consensus sont plutôt à la baisse (Nordea, Vanguard) estimant que le ralentissement de 2019 va se prolonger en 2020 par la contagion du ralentissement chinois au reste du monde et les risques politiques encore trop nombreux pour restaurer la confiance. En revanche aucun scenario très positif évoquant la possibilité d’un net retournement à la hausse de la conjoncture. Compte tenu du consensus sur l’inflation et les taux, un tel scenario fera du bruit sur le marché obligataire et les valeurs qualité / croissance; avec les incertitudes du Moyen-Orient, ce scenario d’une reprise plus forte que prévu en 2020, parce que pas du tout « pricé » dans le marché, est donc l’un des risques de 2020.
D. Ce que nous en pensons. Comme vous le savez une croissance mondiale en reprise modérée en 2020 est l’environnement que nous observons chez Fundesys depuis septembre et la trêve commerciale le renforce; la reprise timide des indicateurs avancés de décembre/janvier et la stabilité de l’activité en novembre/décembre ne valident pour le moment qu’une reprise conjoncturelle limitée en ce début d’année; d’un autre côté le risque de récession, sur la base des fondamentaux actuels, s’éloigne bel et bien en l’absence d’erreur de politique monétaire (c’est bien le cas actuellement avec l’accommodation généralisée de toutes les banques centrales) et de surinvestissement, qui sont historiquement les deux principales causes de récession. La troisième, le choc exogène (prix de l’énergie, conflit militaire impliquant un grand pays, faillites en chaîne, …) est peut-être en train de survenir avec l’escalade Etats-Unis/Iran en cours mais c’est trop tôt pour en faire un scenario. Donc ce scenario de croissance modérée semble être le bon pour ce premier trimestre 2020 ; on verra ensuite.
Pour notre part nous ne cherchons plus à faire de scenario macro tranché et détaillé : notre travail consiste à suivre les 30 statistiques économiques mensuelles significatives au niveau mondial, de comprendre l’interactions des marchés avec elles et d’évaluer d’éventuels décalages ; si manifestement la conjoncture devait s’écarter des prévisions actuelles nous le verrions assez vite pour en tirer des conséquences.
E. Pour résumer :
a) le consensus est très prononcé en faveur d’une croissance mondiale modérée non inflationniste en 2020, qui se déroule exactement sous nos yeux pour le moment ;
b) après 10-15% de hausse des actions depuis septembre, une remontée de 40 bp des taux longs et une progression de 2% de la dette corporate HY, ce scenario commence à être bien intégré dans les cours
c) En l’état actuel et prévisible à 3-6 mois des faibles croissance et inflation et des taux d’intérêt 10 ans, les actions ne nous paraissent pas survalorisées mais plutôt à leur prix ;
d) dans ces conditions la réalisation en 2020 du scenario du consensus laisse espérer une progression des actions de 5% environ, 10% possibles sur un momentum favorable de marché ;
e) la trêve commerciale réduit (sans l’éliminer) le risque USA/Chine et améliore la visibilité macro, aussi de bonnes surprises macro ne nous paraissent-elles pas exclues ; mais la persistance des risques mentionnés au C/b) et la montée (inexorable ?) des tensions au Moyen-Orient obligent à la vigilance ; aussi la stratégie de la résilience nous semble être clairement la meilleure pour ce premier trimestre de 2020 et c’est celle que nous privilégions depuis six mois sans la nommer ainsi.
Par résilience nous entendons la présence de forces de rappel fondamentales, structurantes et historiquement validées de sorte qu’un trou d’air boursier puisse être rapidement rattrapé.
f) au-delà des risques politiques toujours difficiles à intégrer en analyse de marchés, le risque principal que nous voyons en 2020 est celui d’une baisse des PER des actions :
o sous l’effet d’une remontée des taux d’intérêt obligataires liée à une croissance économique plus forte que prévu (probabilité : 15%)
o par la perception d’un ralentissement de la croissance MT des bénéfices durablement affectée par les vents contraires actuels : risques politiques multiples, récession industrielle, évolution de l’opinion vers une croissance plus vertueuse et plus sobre donc mécaniquement moins forte, …
g) sur le risque iranien : difficile de prendre une décision d’allocation d’actifs sur cette base ; il nous inspire deux recommandations : a) renforcer l’exposition à l’or et ses dérivés si elle est actuellement inférieure à 5% des actions; b) si ce risque se traduit par des prix du pétrole significativement et durablement plus élevés, alors les Etats-Unis, producteurs et auto-suffisants voire ponctuellement exportateurs, non seulement seraient moins pénalisés que la ZE et la Chine, mais pourraient profiter de la situation; une raison de plus pour surpondérer les actions américaines.
F. Dans cet environnement de croissance faible, nous identifions des investissements résilients à MT dans cinq compartiments et une méthode :
a. Sur les actions :
o trois « poches » de croissance structurelle à MT très supérieure aux PIB sous-jacents associée à une valorisation modérée que nous définissons comme ne devant pas dépasser 10% de celle de l’indice large caps correspondant : santé (croissance des bénéfices à 12 mois jamais inférieure à 3%, yc en 2008), P/E = 18X), certains fonds small caps France / Europe à valorisation modérée, consommation chinoise à jouer par les actions « A » ;
o la technologie, résiliente par son interaction croissante avec toute l’économie (croissance des bénéfices 12 mois jamais inférieure à 5%, sauf en 2008 (-5%)); mais la valorisation du secteur affiche une prime de 20% vs le S&P 500 ; son attractivité et le momentum sont encore très puissants, donc cette prime peut augmenter, avec la nécessité d’être sélectif;
o les fonds de gérant qui parviennent à construire des portefeuilles de qualité associés à des valorisation raisonnables;
o les fonds à sélection ESG avec là aussi des valorisations modérées
b. Sur les obligations :
o A l’inverse des actions nous préconisons des fonds obligataires offensifs, capables de réaliser une performance proche de celle attendue sur les actions (5-7%) par leur style de gestion (opportuniste) ou leur rendement; objectif : offrir le potentiel de gain des actions avec trois fois moins de risque;
c. La Diversification. Elle offre la résilience par la méthode, dans deux directions :
o L’or / les mines d’or pour contrer la montée des risques politiques
o Des fonds value « soft »pour 20/25% des actions
Rédigé le 6 janvier 2020
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