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Stupeur. C’est le mot qui caractérise sans doute le mieux la réaction des politiques, des analystes et d’une partie de la population européenne suite au référendum britannique de jeudi dernier.

Comme si ce choix de sortir de l’Union européenne n’était pas, à défaut d’être prévisible, à tout le moins envisageable.

Alors que l’euroscepticisme gagne du terrain partout en Europe, alors que Schengen est mis à mal, alors que l’Autriche a failli voir arriver à sa tête il y quelques semaines une formation résolument xénophobe, comment s’étonner que les Anglais disent à leur tour qu’ils veulent moins d’Europe, ou de l’Europe telle qu’elle fonctionne actuellement ?

Au-delà des enjeux économiques, encore incalculables aujourd’hui, le vote britannique pose surtout un problème politique. Il s’agit d’une rupture qui s’ajoute à celles que nous avons connues depuis le début de la crise de 2008.

Des ruptures qui malmènent nos schémas mentaux.

Première rupture sur la hiérarchie Développés/Emergents : avec la crise de 2008 on a vu un pays développé, appartenant à la zone euro, au bord du défaut de paiement, la Grèce, afficher un spread par rapport au taux allemand bien plus important que nombre de pays latino-américains. Aujourd’hui encore, le 10 ans grec à plus de 9% apparaît moins solide que le 10 ans brésilien (5,70%) ou mexicain (3,50%).

Deuxième rupture, corrélative, au niveau de la hiérarchie Govies/Corporate. On a vu à la même époque le CDS (le prix de l’assurance contre un risque de défaut) plus élevé sur la dette d’Etat portugais que sur Portugal Telecom. Il est vrai qu’en cas défaut, ce dernier a des actifs à liquider.

Nouvelle rupture en août 2011 quand le mètre-étalon de l’économie mondiale est bousculé : Standard and Poor’s dégrade la note américaine de AAA à AA. Beaucoup de Triple A connaitront le même sort.

On assiste bien à une forme de New Deal, une redistribution des cartes au profit de nouveaux acteurs sur une scène désormais mondiale et ouverte. Il n’est plus possible de tricoter sa feuille de route économique en tenant compte de son seul agenda national.

Parallèlement, avec la crise de 2008, et ses répercussions en Europe, implose l’idée de « l’Etat qui peut tout ». C’est la fin de l’Etat-Providence, de la corne d’abondance.

C’est dans ce contexte de remise en question des grandes croyances que s’opère la déconnexion entre la doxa « des élites » et la conviction de plus en plus d’électeurs.

Peut-être que le Parlement britannique refusera d’avaliser le referendum, peut-être que le successeur de Cameron tardera à demander l’activation de l’article 50, peut-être qu’un nouveau referendum fournira un résultat différent… Qu’importe ! Le Brexit a eu lieu, d’autres suivront.

fl/ef