Les investisseurs restent engagés à atteindre la neutralité carbone, mais la mise en œuvre de la décarbonation est plus difficile, selon l’Enquête mondiale sur le climat 2023 de Robeco.
Résumé :
-
Près de la moitié des investisseurs ont pris ou prennent des engagements en matière de neutralité carbone
-
Les impacts sur les portefeuilles sont déjà importants, mais la fixation des objectifs est plus lente
-
Il faut faire plus d’efforts pour la réduction des émissions et la transition vers une économie bas carbone
Près de la moitié des investisseurs renforcent leurs efforts de décarbonation dans une certaine mesure, puisqu’ils représentent au total 48 % des investisseurs, contre 45 % dans l’enquête de 2022. Le nombre d’investisseurs qui se sont déjà engagés à décarboner leurs actifs sous gestion d’ici 2050 a légèrement baissé de 27 % à 25 %, tandis que le nombre d’investisseurs qui sont en train de prendre cet engagement a augmenté de 18 % à 23 %.
Le plus grand groupe est celui des indécis, puisque 35 % des investisseurs sont en train d’étudier les conséquences d’un engagement à décarboner pour leurs portefeuilles et la possibilité de réaliser un tel objectif. Ces résultats sont issus de la troisième enquête annuelle auprès de 300 investisseurs dans l’ensemble de l’univers d’investissement, ce qui inclut des gérants et des propriétaires d’actifs, des fonds de pension, des assureurs et des banques.
Réaliser les objectifs de l’Accord de Paris
La nécessité de la neutralité carbone découle de l’Accord de Paris, qui vise à limiter la hausse des températures mondiales à moins de 2 degrés Celsius par rapport aux niveaux pré-industriels d’ici la fin de ce siècle. Pour réaliser cet objectif, le monde doit atteindre la neutralité carbone d’ici 2050, principalement en réduisant les émissions.
L’initiative Net Zero Asset Managers a été signée en 2020 par des investisseurs mondiaux, dont Robeco qui a souscrit au Net Zero Carbon Pledge, en s’engageant à décarboner tous les actifs sous gestion d’ici 2050. Jusqu’à présent, l’Europe est en tête dans ce domaine, avec 37 % des investisseurs qui s’engagent à décarboner, contre 20 % dans la région Asie-Pacifique et 19 % en Amérique du Nord.
Parmi les catégories d’investisseurs, ce sont les assureurs qui prennent la tête, 39 % d’entre eux ayant défini un engagement, notamment parce que le secteur de l’assurance est l’un des plus sensibles au réchauffement climatique, contre 28 % des investisseurs institutionnels et 19 % des sociétés d’investissement « wholesale ».
Q. : Votre organisation s’est-elle engagée publiquement à atteindre zéro émission nette de gaz à effet de serre (GES) pour son portefeuille d’investissement d’ici 2050, ou est-elle en train de le faire ?
Le défi du Scope 3
Les réductions des émissions restent la clé de la décarbonation dans les trois catégories (Scopes). Les émissions de Scope 1 sont générées par l’entreprise elle-même et les émissions de Scope 2 par l’énergie utilisée pour fabriquer le produit. Les émissions de Scope 3 sont les plus difficiles à quantifier, car elles sont générées dans l’ensemble de la chaîne de valeur pendant la durée de vie du produit. Une automobile, par exemple, pourrait générer des émissions pendant des décennies.
L’enquête a montré que 55 % des investisseurs ont acquis une excellente compréhension des principaux impacts importants des portefeuilles sur les émissions, tandis que 42 % ont calculé l’empreinte carbone en se basant sur les données relatives au Scope 1 et au Scope 2. Toutefois, seuls 20 % mesurent les émissions de Scope 3. Ce chiffre pourrait progresser, car l’organisme International Sustainability Standards Board (ISSB) a annoncé son projet visant à rendre la publication des bilans des émissions de Scope 3 obligatoire dans le courant de 2023.
L’autre élément clé est le niveau de transition – les sociétés qui génèrent actuellement beaucoup d’émissions, mais qui font de véritables efforts de décarbonation. Seuls 27 % déclarent avoir obtenu une vue prospective des trajectoires de décarbonation des entreprises dans lesquelles ils investissent, ce qui est fondamental pour comprendre quelles sociétés sont des « acteurs de la transition » crédibles. Les retardataires peuvent souvent être identifiés pour un dialogue actionnarial.
Réduction des émissions
Malgré l’enthousiasme croissant pour la neutralité carbone, sa mise en œuvre s’avère plus problématique, notamment en raison de la difficulté à calculer les émissions. Pour atteindre la neutralité carbone, il faut décarboner les portefeuilles individuels d’environ 7 % par an entre aujourd’hui et 2050, ce qui implique de fixer des objectifs aux sociétés investies et de ne pas simplement recourir au désinvestissement comme « solution miracle ».
Environ 53 % des investisseurs déclarent avoir fixé des objectifs de réduction des émissions de carbone au niveau des classes d’actifs, comme les produits actions. Cependant, seuls 29 % des investisseurs qui prennent des engagements en matière de neutralité carbone ont mis en place des objectifs intermédiaires, notamment sur un horizon de cinq ans, et seuls 13 % ont fixé des objectifs au niveau des émetteurs en ciblant les sociétés elles-mêmes.
Q. : Qu’est-ce que votre approche concernant les objectifs de neutralité carbone des portefeuilles inclut actuellement ? Ou, si elle est encore en cours de finalisation, qu’inclura-t-elle dans les 12 prochains mois ?
Recherche de solutions climatiques
La poursuite de la neutralité carbone a des répercussions sur la construction de portefeuilles, avec en tête une plus forte demande pour des stratégies d’investissement à faibles émissions de carbone. Environ 25 % des investisseurs déclarent qu’il est très probable qu’ils augmentent les allocations aux produits d’investissement qui ciblent spécifiquement les solutions pour le climat, tandis que 11 % d’entre eux l’ont déjà fait. Ils sont presque autant à déclarer qu’ils augmenteraient les allocations aux stratégies basées sur une approche sobre en carbone.
Dans les deux cas, les investisseurs européens montrent la voie, avec 40 % ciblant les solutions climatiques et 49 % adoptant des approches sobres en carbone, en avance sur les investisseurs d’Asie-Pacifique et d’Amérique du Nord. Autrement dit, de grands volumes de capitaux pourraient se disputer un nombre limité d’opportunités jusqu’à ce que le groupe de fonds climatiques soit plus développé. Environ 29 % des investisseurs déclarent qu’ils vont passer à des indices de référence liés au climat, ce qui pourrait avoir des conséquences majeures sur les mandats de gestion passive.
Q. : Quelle est la probabilité que votre organisation prenne les mesures suivantes au cours des 12 prochains mois afin de décarboner son portefeuille d'investissement ?
Un changement climatique plus global
Les résultats sont cohérents avec la question centrale de l’enquête : quel est le nombre d’investisseurs pour lesquels le changement climatique est un élément important, voire central, de leur politique d’investissement ? Ce nombre est resté stable à 71 %, ce qui est légèrement inférieur aux 75 % enregistrés en 2022, suite à une multitude de vents contraires. Ce chiffre devrait toutefois passer à 85 % au cours des deux prochaines années.
Le sentiment a été affecté par l’incertitude géopolitique accrue suite à l’invasion de l’Ukraine par la Russie. Cette situation a accentué les pressions inflationnistes et déclenché une flambée des prix de l’énergie, en particulier en Europe, ce qui a conduit certains investisseurs à suspendre ou à revoir leurs projets d’abandon des combustibles fossiles à court terme.
Lucian Peppelenbos, stratégiste climat et biodiversité chez Robeco : « La durabilité et le climat sont les thèmes que l'on aborde le plus avec nos clients. L'enquête sur le climat montre que les investisseurs progressent dans la mise en œuvre de leurs engagements en faveur de la décarbonation et dans l'intensification de leurs efforts en matière de biodiversité, malgré les marchés énergétiques en difficulté et les pressions politiques. Dans la mesure où le manque de connaissances et de données peut freiner la mise en œuvre, nous devons agir maintenant, car en tant qu'investisseurs, nous avons les moyens d'utiliser notre argent à bon escient et de faire la différence. Chez Robeco, nous considérons qu'il est de notre devoir de partager notre expertise avec les autres, et nous espérons que cette recherche incitera davantage l'industrie de l'investissement à lutter contre le changement climatique et la destruction de la nature, et à travailler en faveur de la décarbonation. »
Pour consulter l'analyse de marché en intégralité, cliquez ICI.
Pour accéder au site, cliquez ICI.