La guerre en Ukraine accélère la mise en place d’un nouvel ordre énergétique. Les pays européens doivent redoubler leurs efforts de diversification des approvisionnements en gaz, d’électrification des usages et d’efficience énergétique, pour atteindre leur objectif de baisse de deux tiers des importations de gaz naturel russe dès la fin de l’année, tout en gardant le cap de la lutte contre le changement climatique. De nombreuses pépites européennes participent à cette transition et constituent autant d’opportunités d’investissement.
Avec un baril de pétrole qui a repassé la barre des 100 dollars dès le début du déclenchement de la guerre en Ukraine, le 24 février, et un prix du gaz en doublement sur un an, les pays européens importateurs d’énergie fossiles doivent relever un véritable défi à brève échéance. Les pénuries créent les conditions d’un « super cycle » de l’investissement en équipement pétrolier, qui était difficilement prédictible il y a quelques mois. Il s’agit d’augmenter la production des champs pétroliers et gaziers existants, de relancer les projets de gaz de schiste américains, mais aussi d’équiper les côtes européennes en terminaux de regazéification, afin d’assurer la première réponse : la diversification des approvisionnements gaziers. Les sociétés comme GTT, Vallourec ou Schoeller-Bleckmann en seront des bénéficiaires directes. Certes, le gaz naturel liquéfié (GNL) provenant des Etats-Unis, du Qatar ou du Nigéria pourrait substituer une petite partie des exportations russes, mais à un prix bien supérieur et en soulevant des problèmes de réseaux inadaptés à ces nouvelles routes partant des ports. Alors que le gaz est considéré comme énergie de transition énergétique dans la terminologie de la taxonomie, l’impératif nouveau d’autonomie énergétique n’en fait plus une solution satisfaisante, la production de gaz en Europe étant orientée en baisse.
En effet, le conflit ukrainien met en lumière la nécessité de changer de modèle et de mix énergétiques. L’électrification des usages domestiques, avec le chauffage par pompes à chaleur, comme exemple le plus évocateur, mais aussi des usages industriels, est inscrit comme priorité. Jusqu’à présent, l’investissement dans les énergies renouvelables était justifié pour des raisons environnementales (objectif de neutralité carbone à horizon 2050). Désormais, nous devons intégrer une contrainte supplémentaire de court terme : réduire la dépendance énergétique de l’Europe, notamment à la Russie.
Le sommet REPower EU organisé à Versailles, les 10 et 11 mars derniers, prévoit ainsi une accélération du déploiement des énergies renouvelables (solaire et éolien) en Europe. La diminution du délai nécessaire pour l’obtention des permis d’installation est au cœur des préoccupations. Il faut en moyenne deux ans et demi pour obtenir un permis, mais le temps d’attente peut parfois s’étirer jusqu’à sept ans. L’objectif évoqué lors du sommet est de ramener ces délais à un an. L’enjeu serait également de centraliser les recours pour éviter la multiplication des interlocuteurs auxquels doivent répondre les développeurs. Cette réduction des délais administratifs seule permettra d’accélérer la mise en service de nouvelles capacités. L’objectif affiché en mars est celui d’un quintuplement des installations annuelles au sein de l’UE par rapport aux cinq dernières années.
Cette accélération de la transition énergétique en Europe créé de nouvelles opportunités pour les investisseurs, en particulier sur le segment des petites et moyennes capitalisations. Parmi les acteurs positionnés sur la filière des énergies renouvelables, nous apprécions une valeur comme Nordex, producteur d’éoliennes onshore allemand dont la gamme est très bien positionnée. Cette industrie à cycle long a subi à la fois la hausse des prix de l’acier, et des pénalités de retard d’installation, entraînant de fortes baisses de multiples. Nous croyons pourtant à un redressement des marges à venir, sous l’effet des hausses de prix et de volumes importants. Citons également un développeur d’énergies renouvelables indépendant comme Energiekontor, entreprise allemande spécialisée dans le développement de fermes éoliennes et de parcs solaires, ainsi que la société suédoise OX2 positionnée sur le développement de l’énergie éolienne, notamment en mer Baltique.
Vers une économie moins énergivore grâce à une meilleure isolation thermique des bâtiments
La France semble moins impactée que l’Allemagne par ce choc énergétique exogène, du fait d’une meilleure diversification de ses sources de gaz, et surtout du fait du poids de la filière nucléaire, peu émettrice de carbone. Le 10 février à Belfort, Emmanuel Macron a présenté un plan d’investissement à horizon 2030 passant notamment par la construction de six nouveaux réacteurs EPR de deuxième génération. A court terme, néanmoins, des arrêts longs de maintenance sont imposés en association à la visite décennale et des investissements massifs sont requis. Il sera donc difficile de maintenir le niveau actuel de production d’électricité d’origine nucléaire au cours des prochaines années, en dépit d’investissements importants. Parmi les valeurs positionnées sur la filière nucléaire, citons Groupe Gorgé. La société française conçoit et fabrique des portes et systèmes de protection d’installations à risque, dont celles utilisées dans les centrales nucléaires, ou encore Assystem, qui réalise les deux tiers de ses ventes dans l’ingénierie et la maintenance de centrales nucléaires.
Enfin, la baisse de la consommation reste un élément essentiel de l’équation énergétique. Isolation des bâtiments, systèmes de chauffages et climatisations plus efficients, efforts demandés aux populations sont prioritaires. Plusieurs pépites européennes semblent devoir bénéficier de ces investissements, parmi lesquelles Recticel, un producteur belge de mousses en polyuréthane et Steico, un fabricant allemand de panneaux d’isolation en copeaux de résineux.
Par Hortense Lacroix, gérante actions chez Financière Arbevel
Pour accéder au site, cliquez ICI.
A propos de Financière Arbevel
Reprise par ses dirigeants actuels en 2009, Financière Arbevel, société de gestion d'actifs indépendante et entrepreneuriale, est un acteur de référence de l'univers des petites et moyennes capitalisations.
Avec une philosophie de gestion centrée sur l’analyse financière, extra-financière et stratégique des sociétés, Financière Arbevel se définit avant tout comme une « Maison de Recherche », disposant d’une équipe d’analystes expérimentée de 15 personnes.
Initialement positionnée comme un spécialiste de stock-picking sur les valeurs françaises, Financière Arbevel a élargi ses expertises (gestion collective et gestion sous mandat) à l’Europe, dans une logique de "cross-asset" sur l’ensemble de ses stratégies d’investissement (actions "core" et thématiques, obligations et gestion diversifiée). Au 31 décembre 2021, Financière Arbevel comptait 2,3 milliards d'euros d'actifs sous gestion.