Christian Eckert et Michel Sapin ont signé hier le décret instituant un registre public des trusts : ce dernier vise à rendre accessible des informations relatives au trust générant des conséquences fiscales en France.
Rappelons que le trust « est une institution répandue dans des systèmes juridiques étrangers, notamment anglo-saxons, mais inconnue en droit civil français ».
Il « se caractérise par le fait que la propriété se divise entre le legal ownership (propriété juridique, qui revient au trustee) et l’equitable interest (titre ou droit de propriété virtuel, propriété économique qui appartient au(x) bénéficiaire(s)) ».
Le décret du 11 mai dernier vient de préciser les modalités de consultation du registre public des trusts. Ainsi, à partir du 30 juin prochain, il sera possible de consulter sur internet les informations suivantes (article 368 de l’annexe 2 du CGI) :
- « La dénomination du trust et son adresse,
- La date de constitution, la date d'extinction du trust,
- La date et la nature de la déclaration de trust mentionnée à l'article 1649 AB du code général des impôts,
- Les éléments d'identification du constituant, du bénéficiaire et de l'administrateur du trust ».
Esther Bendelac, Docteur en droit et associée fondatrice de EB & Associé, relève plusieurs points qui sont susceptibles de poser quelques problèmes pratiques dans la mise en œuvre de ce registre.
« Le décret ne prévoit pas expressément qui de l’administrateur, du bénéficiaire ou du constituant doit lister les informations que le registre doit contenir. De plus, le trust est un mécanisme tripartite dans lequel il n’y a pas d’administrateur mais un trustee. De même le décret ne fixe pas l’identité du payeur de la sanction en cas de non respect de ces obligations déclaratives. Ainsi, il est possible d’imaginer qu’il puisse s’agir du bénéficiaire. Cependant, rappelons qu’au sein de certains trusts, le bénéficiaire ou l’equitable interest (propriétaire virtuel) ne devient pas en toutes hypothèses le propriétaire effectif ».
Il s’agit de détails mais qui ont toute leur importance dans la mise en œuvre pratique d’un dispositif. Plus concrètement, Esther Bendelac souligne que la sanction, de la non délivrance de ces informations, inscrite à l’article1736 IV Bis du CGI est de 20.000 euros (modulable). Compte tenu des sommes importantes mises en jeu lors d’un trust et le caractère peu dissuasif de la sanction, il est fort à parier que ce décret ne change pas grand-chose dans la constitution à venir des trusts.
La signature de ce décret s’inscrit dans le mouvement visant à mettre un terme « à l’utilisation de sociétés écrans à des fins d’évasion fiscale, de blanchiment ou de financement d’activités illicites », plus largement dans le mouvement de lutte contre les fraudes fiscales. On peut souligner la proximité de la signature de ce décret avec la polémique autour des « panama papers ». Coïncidence ou opportunité, nous vous laissons juger…
SL/FL