Coup de théâtre mercredi soir ! Silicon Valley Bank (SVB) annonce une importante augmentation de capital et une vente à perte de 21 milliards de dollars de son portefeuille obligataire pour faire face à la baisse de ses dépôts bancaires depuis plusieurs mois. La nouvelle a fait plonger le titre de plus de 60 % ce jeudi et a entraîné un vent de panique sur les valeurs bancaires américaines avec une chute de 6,85 % de l’indice sectoriel S&P 500 Banks Industry Group.
Dans ce genre d’évènement, il est nécessaire de prendre du recul et d’en analyser les causes et les conséquences potentielles de façon factuelle et non sous le coup de l’émotion. Est-ce un épiphénomène ou le début d’un effet de domino qui pourrait aboutir à une nouvelle crise financière ?
Inconnue du grand public européen, SVB n’est pas une simple banque régionale comme il en existe beaucoup aux États-Unis avec une licence fédérale. Elle est réputée pour être la spécialiste du financement des entreprises innovantes et de sciences de la vie outre-Atlantique, via son activité auprès des fonds de capitalrisque. Le total de ses crédits dépasse 70 milliards de dollars au 31 décembre 2022, en augmentation de plus de 20 %. Seulement voilà, le durcissement monétaire de la Fed et la forte hausse des taux depuis 2022 ont asséché la trésorerie des clients de la banque. Depuis fin 2021, SVB subit des retraits réguliers et importants, faisant baisser les dépôts de plus de 20 milliards de dollars. Pour y faire face, celle-ci-doit rééquilibrer son bilan pour le rendre plus liquide, d’où la cession, même avec une perte de 1,8 milliards de dollars, rendue public mercredi.
Est-ce un cas isolé ? SVB se distingue de ses consœurs régionales par un bilan déséquilibré et apparaît effectivement comme une exception, puisque son ratio de titres détenus sur dépôts culminait à 70 %, pour une médiane à 27 %. Elle est donc beaucoup plus vulnérable à une hausse des taux et les pertes latentes du portefeuille s’élèveraient à 15 milliards de dollars.
Elle paye donc chèrement sa gestion actif-passif désastreuse. Si la fuite de capitaux se poursuit, l’augmentation de capital ne suffirait donc pas, d’où les rumeurs d’un plan de sauvetage imminent. Toutefois, en cas de faillite, l’impact systémique sur le système bancaire américain est négligeable puisque le total de ses emprunts à court et à moyen termes s’élève à moins de 10 milliards de dollars. La plupart de ses créances concernent les dépôts de ses clients. Ce serait donc un choc plutôt pour les épargnants et les entreprises ayant confié une partie de leur trésorerie.
Par Arnaud BENOIST-VIDAL, Analyste macroéconomique
Gérant du fonds Arc Actions Santé Innovante ESG
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