Nous assistons sous nos yeux à un nouvel exemple de l’effet domino au sein de la finance mondiale.
Partie (encore une fois!) des Etats-Unis, la crise de confiance dans les banques a atteint la semaine dernière, le vieux continent en général et la Suisse en particulier. Il s’agit bien d’un sujet de confiance. La confiance représente la matière première des banques. Les banques font en effet de l’argent avec la confiance de leurs clients et de leurs investisseurs. C’est la confiance qui permet aux banques d’investir sur le long terme, les liquidités prêtées par les déposants sur le court terme. Et c’est bien, en ce qui concerne Silicon Valley Bank et Crédit Suisse, le manque de confiance qui a condamné ces deux entreprises.
Les raisons de cet « abandon » de confiance sont différentes dans les deux cas, mais le résultat est le même, les clients « fuient » la banque, c’est-à-dire demandent le transfert sans délai de leurs dépôts bancaires, tandis que les investisseurs cèdent en panique leur titre de capital ou de dette. Pour Silicon Valley Bank, le déclencheur a été les appels de liquidité de ses clients entreprises start-up. La banque californienne, pour assurer les versements à ses clients, a été contrainte de céder à perte une partie de son portefeuille obligataire, ce qui a eu pour conséquence de dégrader sa solvabilité en dessous des minima règlementaires.
Pour Silicon Valley Bank, le déclencheur a été les appels de liquidité de ses clients entreprises start-up. La banque californienne, pour assurer les versements à ses clients, a été contrainte de céder à perte une partie de son portefeuille obligataire, ce qui a eu pour conséquence de dégrader sa solvabilité en dessous des minima règlementaires. Dans le cas de Crédit Suisse, les problèmes liés à sa banque d’investissement ne sont pas récents, mais ont pris un tour nouveau dans le contexte de défiance né de la faillite de Silicon Valley Bank. La prise de conscience, la semaine dernière, que les hausses historiques des taux, depuis un an, ne pouvaient se réaliser sans douleur, ont conduit les investisseurs à rechercher la prochaine victime. Crédit Suisse présentait dès lors le profil idéal.
Englué depuis des années dans différents scandales (affaire de corruption autour des prêts accordés au Mozambique « tuna bonds ») ou pertes fracassantes (5.5 milliards de dollars de pertes en 2021 dans la débâcle du Fonds Archegos), le Crédit Suisse affichait à la veille de cette crise un profil de risque fragilisé. Des erreurs de communication de la banque et de son principal actionnaire, la Saudi National Bank, ont fait le reste. Inquiets, les investisseurs ont commencé à vendre massivement leurs titres la semaine dernière, les médias spécialisés, puis généralistes ont commencé à traiter le sujet et enfin, les clients particuliers, alertés, ont choisi (logiquement et à bon droit) de reprendre leurs dépôts logés chez Crédit Suisse sans délai. Ainsi, toute la semaine dernière, les dépôts de la banque suisse ont fondu comme neige (suisse) au soleil. Sur la seule journée de vendredi, 10 milliards de Franc suisse ont été retirés par ses déposants.
La curée avait donc commencé et rien ne semblait pouvoir l’arrêter. Les autorités suisses ont bien tenté, péniblement, en fin de semaine dernière de confirmer les déclarations du management de la banque déclarant que la solvabilité de la banque était intacte, le ver était dans le fruit et la semaine qui s’ouvre aurait certainement marqué une accélération des retraits des clients. Face à ces retraits massifs, la banque n’aurait pas eu d’autres choix que de vendre en catastrophe ses actifs. Or, une partie conséquente de son bilan (1/3 des actifs pondérés du risque) sont logés dans sa filiale de banque d’investissement dont, pour le dire simplement, personne ne connait la vraie valeur.
Cernée de toute part et mis sous pression par les autorités helvétiques soucieuses de préserver la réputation de la Confédération, le Crédit Suisse s’est vu imposé ce week-end un mariage avec son principal concurrent UBS. Cette solution évite le camouflet de la mise en liquidation ou encore de la nationalisation. UBS, au démarrage, peu enclin à jouer les pompiers de service a été prié ce week-end d’obtempérer. La 1ère banque Suisse rachète donc la deuxième pour 3 milliards de franc suisse (40% du cours de bourse de vendredi) assorti d’une garantie de l’Etat de 9 milliards de francs suisse pour couvrir les futures pertes liées à la cession des actifs de la fameuse banque d’investissement. Pour ajouter aux conséquences, 17 milliards de dollars de dettes subordonnées AT1 seront supprimées, c’est-à-dire que ses porteurs ne seront jamais remboursés, ce qui constitue la plus grosse perte de l’histoire de ce segment d’investissement. En revanche, à ce stade, les investisseurs des dettes séniors ne seront pas impliqués dans la restructuration et leurs titres seront repris par UBS.
Est-ce la fin de l’histoire ? Probablement pas. Outre que les investisseurs lésés par ces négociations à vitesse grand V se feront certainement entendre, il est probable que des sujets juridiques apparaissent. Pour autant, là ou il y a une volonté politique, il y a un chemin, pour paraphraser Winston Churchill, et nul doute que le deal ira à son terme. La question plus intéressante est de savoir si cette fusion marque la fin de cette crise démarrée il y a 10 jours ou bien s’il ne s’agit que d’un épisode dans une crise plus large. Nous craignons que ce soit la 2ème hypothèse qui se révèle vraie. Les investisseurs vont en effet chercher (et trouver) d’autres institutions financières mises en difficulté par la hausse rapide et pour une large part non anticipée des taux d’intérêt. Cependant, il n’y a pas que du négatif et la rapidité de réaction des autorités suisses et américaines montre que l’expérience de la grande crise financière est encore dans les esprits, de sorte qu’il est probable que les autorités en charge de la supervision se montreront aussi réactives pour étouffer dans l’œuf les prochaines crises.
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