Les boursiers ont le sourire. Les indices actions dans les pays développés ont battu plusieurs fois leur record historique depuis le début de l’année. Le CAC 40 est désormais à une encablure de la barre symbolique des 8000 points. Malgré toutes les incertitudes économiques, monétaires, sociales et géopolitiques, la patience a payé et ceux qui sont restés investis dans des actifs risqués sont les grands gagnants de l’évolution récente des marchés. Pourtant, quand on analyse les flux internationaux communiqués dans une récente note de Barclays, le bilan est fort décevant, voire accablant pour l’Europe.
En effet, depuis le début de l’année, 8,6 milliards de dollars ont quitté les marchés actions européens, alors que cette classe d’actifs, au niveau mondial, a collecté 74 milliards de dollars, dont 57 milliards ce dernier mois, ce qui est fait la plus forte collecte mensuelle depuis mars 2022.
Comment expliquer une telle désaffection, au milieu de si bonnes performances boursières ? Est-ce une tendance durable ou pouvons-nous espérer un revirement de tendance?
Au niveau des différentes classes d’actifs, le monétaire demeure le champion indétrônable, avec 195 milliards de dollars de collecte, suivi par l’obligataire, crédité de 89 milliards. Avec 74 milliards, les actions ne sont pas ridicules et témoignent de l’attrait des investisseurs pour le risque. Contrairement à ce que l’on pourrait penser, la majorité de cet argent destiné aux actions (72 %) va vers les pays émergents. Plusieurs banques centrales y ont déjà entamé un assouplissement monétaire. Le solde, soit un peu plus d’un quart (28 %), s’oriente vers les marchés des pays développés. De ce reste, les États-Unis en captent 65 % à eux seuls, suivis par le Japon 8 %. Le reste va dans des fonds globaux ou internationaux, investis à 75 % en Amérique du Nord. Le constat est accablant, car les investisseurs étrangers, et européens – ce qui est encore plus déconcertant – n’investissent pas en Europe.
Les raisons sont multiples et connues. Par exemple la faiblesse de l’activité économique, qui contraste avec le fort dynamisme outre-Atlantique ou encore la vulnérabilité de notre continent aux chocs énergétiques et géopolitiques, alors qu’un conflit long et extensible y sévit depuis deux ans. Les opérateurs de marché sont frileux et préfèrent placer leur argent, même sur des actifs risqués, dans des lieux jugés plus sûrs. Forcément, l’eldorado des « 7 magnifiques » attirent toujours davantage les convoitises, au détriment d’autres secteurs et zones géographiques.
Quelles sont donc les moteurs qui ont contribué à une performance de plus de 5 % de l’indice CAC 40 en 2023 ? Tout d’abord, ce n’est pas la fête pour tout le monde car 16 valeurs, soit 40 % du nombre d’émetteurs constituant l’indice, ont connu une baisse du cours de leur titre. Le manque de flux a accentué la sélectivité, accentuant la dichotomie en bourse dans un monde de pénurie d’argent frais. Seulement huit ont vu une progression de leurs cours de bourse de plus de 10 %. Parmi celles-ci, et en plus des traditionnelles Hermès International et LVMH, figurent des sociétés ayant surpris positivement dans une activité historiquement plus cyclique (Safran, Schneider Electric et Publicis). Cette année, le fait de gâter ses actionnaires par des augmentations de dividendes et surtout par des annonces de rachats d’actions supplémentaires a été salué boursièrement par un surcroît de performance. Ensuite, les investisseurs institutionnels ont baissé le niveau de leurs liquidités dans leur portefeuille pour s’acheter les gagnants de ce début d’année. Ils ont vidé leur bas de laine en quelle que sorte. Ce n’est pas un signal très rassurant, car cette vague d’achats est par définition limitée, faute de nouvelles ressources. Autre facteur positif, les fonds spéculatifs ayant des stratégies sur des modèles quantitatifs ont également augmenté leur pondération en actions. Alors, à quand le retour des flux ? Dans le cas où les indicateurs économiques s’amélioreraient en Europe, avec une banque centrale qui initierait un assouplissement monétaire, nous pourrions revivre des collectes positives. Malheureusement, l’histoire a démontré que cette période idéale ne dure que quelques mois au plus. Alors patience et profitons-en le moment venu !
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