Une information est passée totalement inaperçue : l'agence officielle de presse iranienne Isna a déclaré que Téhéran allait commencer à utiliser l'euro à la place du dollar pour ses échanges commerciaux dans le cadre des efforts du pays pour réduire sa dépendance vis-à-vis de la devise américaine en raison des tensions politiques avec les Etats-Unis. Une analyse de John Plassard, consultant pour Mirabaud Securities.
Téhéran essaye depuis des années de marginaliser la devise américaine mais l'essentiel des échanges internationaux du pays s'effectue toujours en dollar.
Rappelons enfin que les transactions bancaires en dollars sont déjà difficiles en Iran en raison de risques juridiques, les entreprises étrangères pouvant être exposées à des sanctions si elles réalisent des opérations avec l'Iran en dollars, même si celles-ci se font via des succursales non-américaines.
Le président américain Donald Trump a fixé un ultime délai jusqu'au 12 mai, pour permettre aux Etats-Unis et à leurs partenaires européens de corriger les « terribles défauts » (dans le texte) dont souffre, selon lui, l'accord signé le 14 juillet 2015 par l'Iran et les puissances du P5+1 (les cinq membres permanents du Conseil de sécurité - Chine, France, Royaume-Uni, Etats-Unis et Russie - plus l'Allemagne).
Le rial a perdu la moitié de sa valeur sur le marché libre entre septembre et la semaine dernière, à un creux de 60’000 contre le dollar avant que les autorités ne fixent un taux de change de 42’000 et ne lancent une mise en garde contre l'utilisation d'autres taux de change au risque d'encourir une amende.
Est-ce la fin du dollar ?
La question se pose depuis de nombreuses années et la réponse est bien évidemment non. C’est effectivement toujours la devise la plus traitée dans le monde et devrait le rester pendant encore un long moment.
Pourtant plusieurs signes montrent que l’équilibre pourrait être plus « pérenne ». La Chine ne vient-elle pas de lancer des contrats pétroliers à terme libellés en yuans et convertibles en or sur les Bourses de Hong Kong et de Shanghai ? Des pays comme la Russie, l’Iran, l’Angola, le Brésil et le Venezuela ont déjà accepté que la Chine paie leur pétrole en yuans. Pékin ne cache donc pas sa volonté de détrôner le dollar comme devise de référence pour les échanges pétroliers, alors que la Chine est récemment devenue le plus important importateur de pétrole.
En plus de favoriser la montée en puissance de la Chine, la stratégie du gouvernement chinois permettrait aussi aux pays qui ont des tensions avec les États-Unis, comme la Russie ou … l’Iran, de s’affranchir d’éventuelles sanctions économiques américaines.
Comme la valeur du dollar américain est notamment déterminée par le jeu de l’offre et de la demande, la dédollarisation de l’économie mondiale pourrait à terme réduire la demande pour le billet vert et faire diminuer sa valeur. Mais cela prendra du temps…